« Esquisses » de » Jean-François Billeter.

EsquissesIl est vain d’affirmer que l’homme est né libre ou que c’est sa vocation de devenir un être libre tant que l’on ne s’entend pas sur une idée positive de la liberté.

Une opposition se fait souvent jour qui adosseraient à ceux qui professent un retour aux Lumières d’autres qui l’honniraient. Mais, et en cela ce texte de Jean-François Billeter est déjà éclairant, ce clivage – comme toute division imperméable – est selon lui avant tout une réduction du terme qui les occupe tous deux. La raison des Lumières n’est pas celle qu’ils croient. Limitée à sa réduction adjectivale, elle n’est plus perçue que comme un succédané du « rationnel » ou du « raisonnable ». Avant tout tentative de connaissance du sujet en tant que sujet, une philosophie des Lumières pensée pour ce qu’elle est nous apporterait bien plus que les dichotomies stériles auxquelles on la réduit.

Deux sésames ouvrent donc la voie de l’observation de notre activité : nous abstenir de bouger, nous abstenir de parler.

Le retour du sujet au sujet, à ce qui le constitue en propre, ne peut se faire qu’en le fixant. Dit autrement, toute pensée de ce que nous sommes vraiment n’émergera que dans et par l’arrêt. Arrêt de l’activité professée pour elle-même, arrêt aussi d’une pensée se concevant sans bornes et sans buts ; la liberté ne peut naître et se développer qu’en dehors d’un mouvement continu.

une activité qui se résume à faire fonctionner un système « n’a pas de fin », dans les deux sens du terme : elle n’a ni terme, ni but. Elle condamne à « l’infini » celui qui s’y livre.

Certes ce ne sont que des esquisses. Certes, certains raccourcis sont parfois tentés un peu abruptement. Certes la conclusion peut paraître – justement – par trop arrêtée. Mais, en puisant allègrement chez Spinoza, en ne jargonnant jamais, en nous permettant de mieux saisir le « geste » respectif à l’oeuvre dans les langues orientales et européennes, ces Esquisses se révèlent être un exercice de philosophie pratique toujours stimulant. Et donc oh combien utile!

Rien ne sert de parler, il faut dire.

Jean-François Billeter, Esquisses, 2015, Allia.

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