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« La probabilité du théisme » de Richard Swinburne.

Probabilité du théismeQu’on réclame s’en distancier ou se situer dans leurs lignées, il n’en demeure pas moins que les travaux de Hume ou Kant figurent des points de bascule de la pensée incontournables depuis 250 ans. Et par delà leurs différences intrinsèques et celles de leurs multiples interprétations, s’il y a bien un héritage qui parait rassembler l’immense majorité depuis lors, c’est celui qui sépare en deux entités irréductiblement distinctes, d’une part ce qu’il nous est donné de connaître et d’autre part ce qui, par essence, est inconnaissable. Pour faire simple, d’un côté la science qui me permet, par l’exercice de la raison et des perceptions, d’atteindre au vrai, de l’autre la foi dont l’objet « Dieu » est par définition hors de portée de la connaissance humaine. Alors que la tradition philosophique millénaire s’était entêté à prouver Dieu par la raison, le divorce semblait irrémédiablement consommé.

S’il nous faut adopter, lors de nos investigations dans le domaine métaphysique ou religieux, les critères de l’enquête rationnelle en vigueur dans les sciences ainsi que dans la vie courante, nous devrons là aussi recourir à ce critère [de simplicité].

Prenez une réalité directement observable, quelle qu’elle soit, qui puisse trouver une explication par l’entremise de lois existantes. Prenez ensuite un autre produit de l’observation du réel, qui vous semble pouvoir être apparenté à cette première réalité, mais qui, pour des raisons inconnues, ne peut être expliqué par ces mêmes lois (par exemple : la production de la parole chez le primate versus la production de la parole chez l’homme) . Ou alors pensez à un phénomène que des outils intellectuels permettent de mesurer, voire de prédire précisément, mais sans en proposer une explication (par exemple : la gravité newtonienne). Dans le premier cas l’être humain cherchera ce qui permettra d’expliquer conjointement les deux phénomènes, dans le second, il tentera, lassé d’en simplement mesurer les effets, d’en percer la cause. Dans les deux cas, l’histoire des sciences démontre que la recherche de l’explication des phénomènes, comme celle de leurs cause, tend toujours à plus de simplicité. En ce qui concerne notre premier exemple, l’entremêlement de lois phonétiques, géographiques, physiologiques, sémiologiques se trouve subsumé par l’explication évolutive. Dans le second exemple, la complexité des modèles mathématiques à même de calculer les mouvements planétaires se trouve expliquée par les courbures de l’espace-temps. En science, le simple gagne toujours

Pour Richard Swinburne, la cause est entendue (sans mauvais jeu de mots) : ce constat de la simplicité à l’oeuvre dans les sciences permet d’affirmer scientifiquement l’existence de Dieu. Dieu existe car l’existence d’un être omniscient, omnipotent, ex nihilo et bon est l’explication la plus simple de tout. Tout simplement.

Si notre brève présentation en dessine des contours un tantinet simplistes, la démarche du philosophe américain est loin de pouvoir se réduire à cette appréciation. En démontrant d’abord que les principes humiens ou kantiens qui président à cette séparation radicale reposent peut-être sur des contradictions, en postulant cette hypothèse claire de la simplicité qui régirait la science, en s’armant ensuite de moyens logiques ayant fait leurs preuves dans d’autres domaines, et s’appuyant sur le tout avec détermination et rigueur, il nous oblige à exercer notre pensée autrement. Et, si nous prenons garde de nous défaire de certains a priori anti-analytiques ou anti-théologiques, sa démonstration ne manque pas d’élégance.

Richard Swinburne, La probabilité du théisme, 2015, Vrin, trad. Paul Clavier.

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