Baqué, Joël – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « La fonte des glaces » de Joël Baqué. https://www.librairie-ptyx.be/la-fonte-des-glaces-de-joel-baque/ https://www.librairie-ptyx.be/la-fonte-des-glaces-de-joel-baque/#respond Tue, 22 Aug 2017 07:59:59 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6965

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Louis est le fils d’un comptable mort avant sa naissance écrasé par un éléphant africain alors qu’il venait – le comptable – de se reconvertir du commerce de pneu dans celui de la banane. Élevé à Toulon par une mère anxieuse, survivant d’une adolescence traversée sous le nom de Fuck Dog Louis, Louis épousera Lise et la carrière de boucher. Mais c’est après la mort de son épouse et sa retraite du monde des boudins et rillettes qu’il connaîtra l’extraordinaire aventure qui changera et sa fin de vie et la face du monde.

Si le bonheur existe, le manchot empereur en propose une version plausible et maîtrisée.

De cette aventure, pour en maintenir tout le sel de sa découverte, nous ne dirons que fort peu. Sachez seulement qu’on y chasse l’iceberg, qu’on s’y ébat en chambre froide, qu’un être humain équipé d’une combinaison orange y flirte avec un manchot empereur femelle, qu’on y mange des biscuits soviétiques en conserve, qu’on y apprend qu’un boudin peut être philosophique et que le grésillement que fait une mouche s’électrocutant sur un tue-insecte électrique peut se révéler être un puissant excitant libidinal…

Je monte la boîte, on voit après ce qu’on met dedans.

On rit beaucoup dans cette fonte des glaces. Énormément même. Mais l’hilarité déclenchée, souvent potache d’ailleurs, ne dissimule qu’imparfaitement la subtile intelligence du propos. Ainsi, en faisant très discrètement reposer son récit sur certains des mécanismes absurdes avec lesquels l’homme envisage son rapport à l’écologie, Joël Baqué permet-il d’une part d’en faire ressentir mieux le confondant ridicule, d’autre part d’attester que le dévoiement formel de cette mécanique est aussi une des conditions de la littérature. Drôle donc! Mais surtout brillamment malin!

Le titre trouvé, le contenu coulait de lui-même.

Joël Baqué, La fonte des glaces, 2017, P.O.L.

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« La mer c’est rien du tout » de Joël Baqué. https://www.librairie-ptyx.be/la-mer-cest-rien-du-tout-de-joel-baque/ https://www.librairie-ptyx.be/la-mer-cest-rien-du-tout-de-joel-baque/#comments Tue, 06 Dec 2016 08:32:07 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6394

Lire la suite]]> La mer c'est rien du toutLa mer devait avoir des avantages puisque tout le monde allait s’y baigner, sauf nous. Mon père disait : « La mer c’est rien du tout, mais l’océan, ça oui c’est quelque chose! La mer c’est qu’un attrape-touristes! ».

Quelle chose étrange que la tentative de faire de cette somme de riens qu’on appelle sa vie le matériau d’un livre. Combien, souvent, y transparaît le vide de l’existence que ce livre paraissait devoir combler. A trop devoir servir les intentions de qui l’écrit, le livre, naviguant entre pathos psychanalytique et désir d’exister à tout prix, s’englue alors dans dans les poncifs d’une sentimentalité lourdingue avant de sombrer dans les abysses de la littérature complaisante. Trop souvent s’y contemple le coupable oubli d’une évidence : transformer ce qui vous arrive en littérature n’a finalement que très peu à faire avec ce qui vous arrive.

Une cousine avait rapporté de Lourdes une vierge Marie dont le plastique transparent permettait de voir le niveau d’eau bénite. La tête servait de bouchon. Un jour de grand soleil, je l’avais ramollie avec une loup et remise à sa place sur la table de chevet. J’espérais que ma mère crierait au miracle (mais c’est mon père qui a crié)

Une autre possibilité surnaturelle eût été d’y introduire un des comprimés de ma mère. Ce miracle de la vierge effervescente, je l’ai conçu puis oublié jusqu’à maintenant où c’est trop tard, j’ai passé l’âge de faire des miracles.

En courtes « capsules » – comment les nommer? – Joël Baqué nous emmène à travers son enfance. Entre un père odieux, une mère dépressive, une sœur canon, un frère pédé, on le voit se construire peu à peu, par le sport, par le métier, par la littérature. Entre auto-dérision et éclats de rires, on quitte subrepticement l’auto-évocation, le simple déroulement de souvenirs épars de l’auteur en construction, pour embrasser le récit touchant d’un drame. Et au fil d’impressions quasi pointillistes, Joël Baqué parvient à construire une narration dont les outils se forgent finalement sous les yeux du lecteur.

On n’employait jamais de mots pour le seul plaisir de les dire.

De cette famille où le père, tellement insupportable qu’il en devient – presque, faut pas déconner – attachant, manie un discours charriant une brouette de préjugés à chaque phrase, où chaque mot – comme tout le reste – n’est là que pour « être utile », de ce lieu social où « il faut faire attention », où tout « coûte bonbon », où « on ne veut pas d’histoires », où « on est un peu juste », de cet univers, l’auteur va s’extirper par le langage. Ce qui se lit dans La mer c’est rien du tout, c’est la magie en acte de la littérature. Alors que le milieu dans lequel il grandit se défie à ce point des mots qu’il les scelle dans la chape de plomb d’un conformisme sans concession, l’auteur s’y forge une conscience de la puissance de ceux-ci, pour in fine, rendre grâce à ce qui y germe de plus beau.

Ma sœur c’était sa beauté à elle, mon frère son bégaiement à lui. Ces lignes, c’est votre lecture à vous (c’est notre partage à nous).

Joël Baqué, La mer c’est rien du tout, 2016, P.O.L.

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