Sagot Duvauroux, Caroline – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « ‘j » de Caroline Sagot Duvauroux.* https://www.librairie-ptyx.be/j-de-caroline-sagot-duvauroux/ https://www.librairie-ptyx.be/j-de-caroline-sagot-duvauroux/#respond Tue, 14 Jul 2015 08:02:50 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5283

Lire la suite]]> 'jSeul, donc, je, ne peut pas.

Prenons cette phrase, ce vers.  Voire même, en son sein, cette seule virgule séparant ce qui s’apparente à un pronom sujet « je » et le verbe nié qui le suit « ne peut ».  Retirons celle-ci et conjuguons « normalement » la phrase :

Seul, donc, je ne peux pas.

Que se loge dans cette différence si ce n’est le décisif écart qu’est la poésie.  Ce n’est nullement d’un sujet qu’il s’agit dans la première, celle de Sagot Duvauroux, si ce n’est du sujet grammatical.  En lui faisant perdre sa particularité, sa singularité – par une virgule et une conjugaison autre – elle le dépouille de sa teneur psychologique.  Le « je » n’est plus ici celui d’un sujet psychologique, mais celui de tout sujet, celui de la phrase, grammatical, comme celui de tout sujet.  Il devient comme un commun et réalise dès lors ce que la phrase proclame.  Le « je » qui « peut » se différencie du « je » qui « peux » par cela même qu’il n’est pas seul.  Il lui faut la virgule et le « t » pour exister, différencié de l’autre « je ».

Sait-on ce qu’on dit

De même ici – mais comme une image en miroir de notre premier exemple -, la grammaire sert-elle un projet qui la dépasse.  Le « on », cet impersonnel, ce vague, le reste par le verbe conjugué qu’on lui conjoint.  Le « on », on ne sait ce qu’il dit car, précisément, il reste indéterminé jusque dans la terminaison du verbe qu’il conjugue.  Là où le jeu est possible avec le « je », sa possibilité s’éteint avec (et dans) le « on ».  Et cette impossibilité de devenir son principe même.

L’instantané se révèle pérenne.

Alors certes, la poésie – la seule qui vaille, fondée dans le mot – de Caroline Sagot Duvauroux est un jeu.  Elle s’ancre dans le mot et les jeux qu’ils proposent.  Mais sans s’y arrêter.  Elle n’est ni gratuite ni fermée sur elle-même.  Le jeu n’est là que pour révéler.  Et la virtuosité de la poétesse n’est qu’un outil utile à éclairer des pans de réel sinon maintenus dans l’ombre.  Où peut, aussi – aussi, car entre bien d’autres « choses » -, éclore une sensualité.

Tu seul sut ouvrir des lèvres en je pour que tu s’écroule.

Caroline Sagot Duvauroux, ‘j, 2015, Unes.

*la technologie permet-elle la poésie et jusqu’où? Possibilité de liberté, le technique ne devient-elle pas emprise? Le langage à créer demande en tout cas de forcer les standards que la technique impose sur le langage normé. Nous avons essayé de transposer dans le titre de cette chronique le le « j » et l’apostrophe qui le précède. Sans succès…

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