D’Agata, John – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « Que faire de ce corps qui tombe » de John D’Agata & Jim Fingal. https://www.librairie-ptyx.be/que-faire-de-ce-corps-qui-tombe-de-john-dagata-jim-fingal/ https://www.librairie-ptyx.be/que-faire-de-ce-corps-qui-tombe-de-john-dagata-jim-fingal/#respond Wed, 11 Mar 2015 07:06:20 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5047

Lire la suite]]> Que faire de ce corps qui tombeLe 13 juillet 2002, à 18 h 01 min 43 s, tout en haut de la tour du Stratosphere Hotel de Las Vegas, Levi Presley enjambait la rambarde qui le séparait du vide. 350 mètres plus bas, soit 9 secondes plus tard, il trouvait la mort sur l’asphalte de la rue ramolli par la chaleur d’un été torride. Il pratiquait le taekwondo. Il avait 16 ans.

En 2005, l’écrivain John D’Agata envoie à la célèbre revue The Believer un essai dans lequel, à sa façon bien particulière, il s’empare de ce fait divers tragique. L’éditeur de la revue confie alors au stagiaire Jim Fingal, un fact-checker débutant, le soin de recouper les éléments factuels qui émaillent le texte de l’écrivain. Ce sont cet essai (au centre de la page) et les échanges entre auteur, fact-checker et éditeurs (tout autour de l’essai) qui sont donnés à lire dans Que faire de ce corps qui tombe.

Cet essai concerne une idée, et Lévi représente cette idée.  Maintenant, est-ce que c’est grossier d’appeler « une idée » un jeune mort que je n’ai jamais connu?  Sans doute.

Qu’est-ce qu’un fait ? La chute de Levi Presley a-t-elle duré 8 ou 9 secondes ? Le revêtement du sol sur lequel le corps du jeune homme fut retrouvé était-il de couleur rouge ou brune ? Le mot “suicide” existe-t-il en hébreu ?  La hauteur dont Lévi a chuté est-elle de 253 mètres ou 261 mètres?  Quelle est la hauteur optimale des plafonds d’un casino?

Jim : Mais enfin, qu’est ce qui vous autorise à faire passer pour un fait une légende à moitié recuite et à mettre de côté les questions de vérité factuelle?

John : Ca s’appelle de l’art, tête de nœud.

Toutes ces questions, ponctuelles, renvoient à d’autres, plus fondamentales : peut-on faire montre d’imagination dans le cadre de la non-fiction ? N’est-ce pas attenter au respect ancestral dû à un mort que d’inventer délibérément les circonstances de sa disparition ? Qu’est-ce que le vrai ? Dans ces échanges tour à tour drôles, émouvants, doctes, naviguant entre débat et combat, virant parfois à l’injure, et, jusqu’à sa vertigineuse et bouleversante chute, Que faire de ce corps qui tombe interroge, avec subtilité, notre délicat rapport au réel.

la chose la plus importante à mettre en relief ici, c’est la recherche d’une signification.

Que faire intérieur

 

 

 

 

 

 

 

 

John D’Agata & Jim Fingal, Que faire de ce corps qui tombe, Vies Parallèles, 2015, trad. Henry Colomer.

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« Yucca Mountain » de John D’Agata. https://www.librairie-ptyx.be/yucca-mountain-de-john-dagata/ https://www.librairie-ptyx.be/yucca-mountain-de-john-dagata/#respond Tue, 10 Jul 2012 05:49:52 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=839

Lire la suite]]> Yucca Mountain est le nom d’une montagne située à 140 kilomètres de Las Vegas, que le gouvernement américain a choisi pour « abriter » les déchets issus de ses centrales nucléaires.  John D’Agata, professeur de littérature à l’université d’Iowa, a un rêve.

Le rêve qu’en nous attardant assez longtemps sur une chose, son sens véritable finira forcément par se révéler.

Et il s’attarde donc.  Et détaille par le menu chiffré tout le processus à l’oeuvre dans ce projet d’enfouissement.  Ce sont les milliards de dollars nécessaires pour aménager la montagne, la corruption des élus par les lobbys du nucléaire, les manuels scolaires clamant que « le nucléaire est une énergie verte ».  Ce sont aussi toutes les « libertés » prises à l’égard de la notion même de raison : le transport en provenance du pays entier des 70.000 tonnes de déchets radioactifs par des voies au trafic dense qui est jugé risque acceptable ; la constitution d’un collège d’experts chargé d’inventer une signalétique indiquant la dangerosité du site et compréhensible dans 10.000 ans alors même que la durée de toxicité des produits stockés se calcule en centaines de milliers d’années ; les exigences auxquelles doivent répondre les matériaux utilisés pour le confinement des déchets qui sont revues à la baisse car aucun ne pouvant répondre aux demandes imposées par une réalité déjà édulcorée.  On s’invente un réel.  On se force à y croire.  Dans un positivisme paresseux où la notion de probabilité occulte celle de possibilité, qu’elle est censée éclairer.  Par la simple juxtaposition des chiffres, des faits, John D’Agata interroge froidement le nucléaire.  Mais le texte glisse.  Derrière, ou plutôt dessous l’analyse froide du risque nucléaire, peu à peu se dessine une trame autre.  Le texte semble s’évader.  On y parle d’un hôtel indestructible, d’un territoire d’indiens spoliés, d’une ville de la démesure où le suicide est l’une des première cause de décès.  Edvard Abbey, Edvard Munch sont convoqués.  Une tension dramatique se fait jour.  Jusqu’à la chute.

Je ne crois pas que Yucca Mountain soit une solution ou un problème.  Ce que je crois, c’est que la montagne est ce lieu où nous sommes, le point où on en est – un lieu que nous avons étudié en long et en large, plus que n’importe quel autre endroit au monde – et qui pourtant reste inconnu, révélant l’étendue de la fragilité de ce que nous pouvons connaître.

Alors que « nous perdons parfois notre sagesse en cherchant la connaissance », John D’Agata, en creusant ses galeries dans Yucca Mountain, en ressort un tissu de sens et rénove génialement ce genre qu’est l’essai.

John D’Agata, Yucca Mountain, 2012, Zones sensibles.

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