Josipovici, Gabriel – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « Dans le jardin d’un hôtel » de Gabriel Josipovici. https://www.librairie-ptyx.be/dans-le-jardin-dun-hotel-de-gabriel-josipovici/ https://www.librairie-ptyx.be/dans-le-jardin-dun-hotel-de-gabriel-josipovici/#respond Mon, 06 Mar 2017 09:11:56 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6580

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-Je suis désolé.

Alors que sa relation avec Sandra vient de s’achever, Ben raconte à Rick et sa compagne Francesca, ses amis proches, sa rencontre avec Liliane. La jeune femme est venue en Italie, à Sienne, pour y rechercher un jardin dans un hôtel, où sa grand-mère serait tombée amoureuse d’un jeune violoniste, avant la guerre qui le verra disparaître dans les camps. Peu à peu, leur rencontre les transforme.

Uniquement composé de dialogues, Dans le jardin d’un hôtel, comme souvent chez Josipovici, se pare des habits du banal. Une promenade avec le chien, une ballade en montagne, boire un cappuccino ou un thé à la menthe, converser de tout et de rien, parler « du temps qu’il fait »… Rien que d’insignifiant.

-C’est juste une de ces choses qui n’ont pas de sens en soi, dit-elle. Ça prend seulement un sens sur la durée, pour ceux qui sont concernés.

Gabriel Josipovici a compris que certaines choses ne peuvent prendre de sens que racontées. Et qu’il n’est possible d’en faire déceler l’importance qu’en leur adjoignant une forme qui puisse les extirper du banal. Pour ceux qui sont concernés (pour ceux que magiquement, comme en s’en excusant, la plume de Josipovici parvient à concerner), ces riens qui tissent tout d’une vie trouvent ici une forme qui rend génialement grâce au génie d’un des esthètes les plus accomplis de l’art de raconter.

Gabriel Josipovici, Dans le jardin d’un hôtel, trad. Vanessa Guignery, 2017, Quidam.

 

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« Infini, l’histoire d’un moment » de Gabriel Josipovici. https://www.librairie-ptyx.be/infini-lhistoire-dun-moment-de-gabriel-josipovici/ https://www.librairie-ptyx.be/infini-lhistoire-dun-moment-de-gabriel-josipovici/#respond Tue, 26 Jan 2016 08:53:57 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5657

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Infini l'histoire d'un moment
Quand le compositeur comprend que l’éternité et le moment ne sont qu’une seule et même chose il n’est pas loin de devenir un vrai compositeur.

Le narrateur interroge un dénommé Massimo à propos d’un certain Tancredo Pavone, dont il fut des années durant le fidèle majordome. Rapportée par ce dernier, nous est alors dévoilée pour parties l’existence de ce riche, noble et excentrique compositeur qui traversa le vingtième siècle. Libre, originale, agrémentée de ses amitiés avec les plus grands de l’époque (Michaux, Jouve, Bernstein) et d’autant de voyages « exotiques », la vie de Pavone se lit comme la découverte et la remise en jeu permanente de ce qu’est une vie.

Il faut faire sa musique dans cet espace intérieur. Il faut meubler cet espace intérieur avec suffisamment de meubles pour vivre avec un minimum de confort.

Riches d’influences diverses, de revirements radicaux (dont il est toujours plus facile de se remettre quand on est particulièrement fortuné), si sa relation à son métier, totale et entière, est bien faites d’atermoiements conceptuels et d’avis arrêtés, elle n’est pas non plus une errance sans fin. Loin s’en faut. Car peu à peu se fait jour en Pavone une idée de plus en plus précise – et tranchée – de ce que composer veut dire. Et qui font de ce livre une des plus remarquable réflexion sur la musique qu’il nous ait été donné de lire.

L’art de la composition […] c’est l’art de laisser aller, pas de retenir.

C’est en jouant une seule note encore et encore et encore que l’on atteint le cœur de cette note.

Mais cette réflexion ne serait pas grand chose si elle ne se redoublait pas, dans le corps même du texte, de sa mise en acte. Car si la musique, la vraie, ne peut s’atteindre que par l’apprentissage d’un « laisser-aller », d’une concentration absolue et focalisée sur une note, en rendre compte vraiment ne se peut qu’en en matérialisant le procédé sur la page.

Le chant va quelque part, la psalmodie est déjà là.

Le début abrupt du roman, les « continuez » qui en constituent le rythme, l’indétermination des narrateurs, leur disparition progressive dans le flux de la parole, tout cela concourt à faire de ce récit une psalmodie dont émerge, quintessencié, l’art subtil de dire.

C’est la musique qui compte.

Gabriel Josipovici, Infini, l’histoire d’un moment, 2015, Quidam, trad. Bernard Hoepffner.

Les sons ci-dessus sont tirés de l’émission Les Glaneurs sur Musique 3, produite pas Fabrice Kada et réalisée par Katia Madaule.

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« Goldberg : Variations » de Gabriel Josipovici. https://www.librairie-ptyx.be/goldberg-variations-de-gabriel-josipovici/ https://www.librairie-ptyx.be/goldberg-variations-de-gabriel-josipovici/#respond Fri, 05 Sep 2014 07:40:10 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=4330

Lire la suite]]> Goldberg variationsQuelle est la raison, à votre avis, qui fait qu’Homère décrit Ulysse comme un menteur invétéré?

Dans l’Angleterre georgienne, Thomas Westfield, gentilhomme anglais souffrant d’insomnie, engage Samuel Goldberg, écrivain juif d’âge mur, afin que celui-ci lui fasse la lecture jusqu’à ce que le sommeil le gagne.  Décliné en trente chapitres-histoires-fugues, Goldberg : Variations embrasse rien moins que la totalité.

Aucune chose n’était plus ce qu’elle était, elle était toujours un élément d’une série qui s’étendait en arrière et en avant à l’infini.

S’inscrivant dans un héritage littéraire d’une richesse plus reconnue que lue (Sterne, Homère, Les mille et une nuits), puisant à grands seaux dans la peinture, la musique, les religions (difficile de ne pas penser au Talmud) ou les mythologies , le projet de Gabriel Josipovici, s’il s’ancre bien dans une certaine forme de tradition, s’en émancipe par son ambition même.  Sorte de panorama presque exhaustif des formes que peut prendre la fiction, Golberg : Variations, tour à tour, déploie puis dévoile les moyens de son objectif.  Roman à tiroirs, mises en abymes, mise en doute de qui raconte, de ce qui est raconté, et même de qui lit, chaque exercice est ici pratiqué, puis décodé.

Il sentait son cœur se réjouir tandis qu’il avançait dans les bois par une belle matinée d’été, et il riait à voix haute du simple plaisir de sa joie, et alors d’un seul coup l’image de lui-même en train de rire et le son des mots il sentait son cœur se réjouir tandis qu’il avançait envahissait sa tête et éloignait le bonheur de son cœur et le rire de sa gorge.

C’est aussi cela que permet ce mensonge qu’est le roman.  Cette mise à distance, dans l’autre, qui est aussi indissociable d’une perception de soi (et de soi percevant), est une des possibilités les plus fortes, et vertigineuses, qui nous soit donnée pour nous éprouver nous même.  L’expérience de soi ne peut faire l’économie de la fiction.  Car elle seule peut nous faire goûter à ce vertige qu’est cette réalité : nous vivons aussi dans l’autre.  En ce sens, Gabriel Josipovici remet cet acte de mentir qu’est faire de la fiction au centre même de la nécessité de la vérité.  Etre vrai suppose mentir.

Ce ne sont peut-être que ceux qui n’ont que très peu de confiance en la vérité qui craignent, comme nous le faisons, le pouvoir indubitable des mensonges.

Jouant et se jouant de ses références et de ses métaphores dans un maelström éblouissant dont le lecteur final (vous en fait, c’est-à-dire un être lui-même tissé de fictions), s’il n’en sort jamais indemne, ne se sent jamais exclu, Golberg : Variations se lit comme une mécanique huilée, totale et géniale, fonctionnant et donnant du plaisir jusque dans ses moindres rouages.  Jusque dans l’aveu d’échec inéluctable de qui cherche à atteindre l’impossible.

La mélodie est hantée par le sentiment qu’elle pourrait être autre, qu’elle n’est qu’une possibilité parmi tant d’autres et, en conséquence, qu’elle est, dans un sens, bien trop prodigue, se jetant dans le vide, dans le silence, alors que peut-être même le silence aurait pu être meilleur, aurait pu être plus efficace.  L’ombre de l’arbitraire et du délibéré gâche même sa plus belle floraison.

Goldberg : Variations est un enchantement!

Gabriel Josipovici, Goldberg : Variations, 2014, Quidam, trad. Bernard Hoepffner.

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« Tout passe » de Gabriel Josipovici. https://www.librairie-ptyx.be/tout-passe-de-gabriel-josipovici/ https://www.librairie-ptyx.be/tout-passe-de-gabriel-josipovici/#respond Tue, 11 Sep 2012 21:08:09 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=1365

Lire la suite]]> – L’ennui, avec la plupart des oeuvres littéraires, dit-il, c’est qu’elles vous abordent frontalement. Ca ne se passe jamais comme ça dans la vraie vie. Les choses se contentent de nous passer devant et nous en avons à peine conscience que déjà elles sont parties.

Gabriel Josipovici se situe justement dans ce passage.  Son écriture happe ce qui ne fait que passer.  Elle est une trace.  De l’existence de Felix, derrière une fenêtre fêlée, elle saisit les bribes.  Les enfants, l’amour, l’amitié, la mort des autres et celle dont on fait l’expérience, les projets d’écriture, Rabelais, Sterne, Beethoven…  Et, peu à peu, se révèle sous nos yeux toute une vie dans ce qu’elle a de beau, de touchant, de partagé et d’unique.

Dans ce très court texte qui invite à être lu et relu, l’auteur réussit le pari de dire ce qui compte d’une existence dans une économie extrême.  Dépouillée, presque synoptique, la prose est ici comme une collection d’éphémères, de ce qui passe, et dans laquelle se donne magnifiquement à lire un tout.

Et une voix dit : Tout passe.  Le bien et le mal.  La joie et la peine.  Tout passe.

Gabriel Josipovici, Tout passe, 2012, Quidam, trad. Claro.

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