Bailly, Jean-Louis – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « Un divertissement » de Jean-Louis Bailly. https://www.librairie-ptyx.be/un-divertissement-de-jean-louis-bailly/ https://www.librairie-ptyx.be/un-divertissement-de-jean-louis-bailly/#respond Thu, 12 Sep 2013 07:15:13 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=3313

Lire la suite]]> divertissements’associer à la douleur de l’autre c’est d’abord le remercier d’avoir pris sur lui tout ce malheur qui cette fois encore vous a oublié.

Pierre Helmont a perdu sa fille.  Enseignant, il part surveiller les épreuves du BAC dans une petite ville en bord de mer.  Au fur et à mesure des épreuves se dévoilent les circonstances douloureuses du décès, jusqu’au finale inattendu et terrible.

comme dans un cauchemar, la dissociation entre ce que l’on vit et ce que l’on voit, l’impossibilité d’insérer sa personnalité dans une réalité absurde, et l’impossibilité de la fuir.

Qu’est ce que se divertir?  Quelles sont les possibilités de divertissement?  Quelles sont les possibilités du divertissement? Pour Pierre Helmont, les épreuves du bac qu’il fait passer le divertissent des pensées de la mort de sa fille.  Pour les candidats, c’est du BAC qu’il s’agit de se divertir.  Pour sa fille, le divertissement prend une teinte plus tragique.  Ce qui nous divertit peut devenir ce dont d’autres cherchent à se divertir.  Non seulement, dans cette perversion de l’idée pascalienne du divertissement, le jeu est pris pour le sérieux, aussi le sérieux de l’un est devenu le jeu de l’autre.  Dans notre course à ne pas nous confronter au néant, nous faisons s’y engouffrer plus profondément l’autre.

C’est une imposture!  Oui mais parmi tant d’autres.

Alors que le divertissement a pour fonction d’éloigner de l’essentiel pour ne pas étouffer dans celui-ci, et donc, dans la prise de distance que le divertissement permet, mieux l’appréhender, son pervertissement le fait passer pour l’essentiel même.  Et c’est précisément cette prise de distance que re-permet l’acte qu’est lire « Un divertissement ».  La mise en perspective du divertissement se fait ici en divertissant le lecteur, en en renseignant les codes.  Dire la chose.  Et utiliser pour la dire sa substance même.  « Un divertissement » est une imposture, comme tout roman.  Mais une imposture qui s’attelle, en finesse, comme toute écriture qui vaille la peine, à questionner les conditions de l’imposture.

Et le bac pour oublier.

Jean-Louis Bailly, Un divertissement, 2013, Louise Bottu.

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« Mathusalem sur le fil » de Jean-Louis Bailly. https://www.librairie-ptyx.be/mathusalem-sur-le-fil-de-jean-louis-bailly/ https://www.librairie-ptyx.be/mathusalem-sur-le-fil-de-jean-louis-bailly/#comments Fri, 12 Apr 2013 09:45:29 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=2391

Lire la suite]]> MathusalemNous ne pouvons ici, et ce n’est pas l’envie qui nous en manque, déployer quelques strophes alexandrines, où la solitude du coureur de fond rimerait avec sa décrépitude, où le vieillard serait auguste, où chaque pas imprimerait dans la glèbe une trace que le temps n’effacerait pas.  Ô, voyez ces vieillards dans le feu du couchant, Dont les nobles vertuis inspireront mon champ.  Mais ça ne se fait plus.

Encouragés par leur entourage, deux vieillards s’affrontent lors d’une course à pied que leur grand âge ne leur permet que ralentie.  Et dans la lenteur de ce duel, dans les souvenirs des concurents, dans les vies de ceux qu’intéresse cette compétition, c’est près d’un siècle (de 1930 à 2030) de rapport à l’image qu’interroge Jean-Louis Bailly.  De la rivalité des vieillards, née d’une photographie vantant l’un d’eux aux dépens de l’autre, qui restera ineffaçable, à tout jamais tangible, dans le papier d’un journal comme dans le souvenir des deux hommes, à cette époque fait écho la notre où une photo est prise dans le même geste, le même temps presque, que celui de son effacement.

Il réalisait en pensée le clip qui, sur Youtube, allait tout faire péter.

Alors qu’aujourd’hui, tout doit être filmé, « imagé », de l’arrachage de dent du gamin au cortex qu’on « s’imagine » malade, en passant par la défloraison de la nubile, cette gabegie d’images renvoie à cet écart ne cessant de se consommer entre l’imager et l’imaginer.  Le premier contaminant à ce point le premier qu’il en vient à le remplacer.  Jusqu’à ce qu’un auteur imagine un avenir qui, d’imagination, précisément, n’en contient plus.

L’imagination suivit donc de près la mémoire dans son processus d’atrophie : aucune importance, puisque les films répondaient avec une certitude scientifique aux attentes du public, calculées, soupesées, mesurées et traduites en courbes.

Et c’est là, entre humour désabusé et tendresse triste, que Jean-Louis Bailly pose les jalons entêtés de sa démarche, redéfinissant d’un même souffle l’utilité du mot à l’ère de l’image inutile.

J’ai dit cela mais c’est ne rien dire, je sais bien que je n’ai fait naître chez mon lecteur aucune image, au mieux quelques suggestions vagues, alors que dans mon esprit l’image est si précise : je savais pourtant que les mots sont impuissants, mais un écrivain s’entête.

Jean-Louis Bailly, Mathusalem sur le fil, 2013, L’Arbre vengeur.

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