Manon, Christophe – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 « Jours redoutables » de Christophe Manon & Frédéric D. Oberland. https://www.librairie-ptyx.be/jours-redoutables-de-christophe-manon-frederic-d-oberland/ https://www.librairie-ptyx.be/jours-redoutables-de-christophe-manon-frederic-d-oberland/#respond Wed, 12 Jul 2017 09:06:41 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6962

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Ça parle de la douleur d’être, de la fugacité des plaisirs, de ces jours où la peur pourrait nous submerger. Ça parle d’épidermes qui se touchent, s’épanchent dans des désirs dont ils savent l’illusoire. Ça parle d’inextinguibles souffrances. Ça parle de nos égarements. Ça parle d’épiphanies. Et ça en parle si bien que ça nous coupe toute herbe sous le pied.

tout cela toutefois est d’une grande beauté.

Christophe Manon & Frédéric D. Oberland, Jours redoutables, 2017, Les inaperçus.

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« Au nord du futur » de Christophe Manon. https://www.librairie-ptyx.be/au-nord-du-futur-de-christophe-manon/ https://www.librairie-ptyx.be/au-nord-du-futur-de-christophe-manon/#respond Fri, 09 Sep 2016 07:45:57 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6244

Lire la suite]]> Au nord du futur

Nous fabriquions du réel

plutôt que d’y répondre mais où

se cachait-il nous ne le savions plus maintenant où

sont-elles les paroles enfouies sous les décombres celles

qui gisent au plus profond

des temps et les larmes recueillies sur des joues

innocentes qui nous les pardonnera qui

saura les effacer et ont-ils de nos nouvelles les morts en leur séjour pourquoi

se rassemblent-ils en nous comme 

emplissant l’espace de baisers et de cris tandis

qu’au dehors le monde s’effiloche et déploie sa fureur et qu’est-il 

le chant sinon cette parole hésitante et boiteuse d’un 

qui s’adresse et s’incarne et porteur

d’une pensée qui s’invente mais

s’ignore ainsi les mots

agencés dans leur chute.

Au nord du futur reprend trois textes de Christophe Manon, assez disparates dans la forme et dans le ton. Dans le premier, chaque page reçoit son bloc de texte, débutant souvent par un Nous, non ponctué hormis un point final. Dans la deuxième partie (au milieu de la nuit, le jour), des phrases comme semblant parfois déposées au hasard se suivent et s’enchevêtrent malgré les césures. Dans la dernière, la plus « spectaculaire », chaque mot de la phrase est environné d’un halo le reprenant dans des teintes d’un gris évanescent.

nous tenions la réalité à distance et cette distance était la réalité.

Christophe Manon échoue. Comme tant d’autres certes. Mais lui le sait. Et c’est de cet échec, le sien comme de celui de tout geste humain, dont il rend compte. Ainsi avec le « Nous » de la première partie – qui peut désigner le « nous » des bâtisseurs du communisme, comme celui qui vient nommer, génériquement, toute tentative communautaire – fait-il le constat, in fine, de l’échec de son advenue. Ou encore,dans la dernière partie, nous rappelle-t-il l’impossibilité de rendre compte de l’éclat d’une parole, celle-ci s’étant déjà comme muée en cendres.

comme ils faisait sombre et comme cependant nous vivions.

Mais l’échec ne signifie pas la fin de tout. Échouer marque des limites plus que des impossibilités. Ainsi, l’échec retentissant qui se dresse face au « nous » n’empêche-t’il pas de continuer à ériger de la joie. De même que les scintillations ou ombres des mots, qui, derrière le sens qu’ils forment, nous rappellent d’où le sens procède. En nous rappelant l’échec et le fragile de notre condition, Christophe Manon insiste sur « ce jour qui toujours brille au milieu de la nuit ». S’il ne nous est pas donné d’approcher au plus près d’un sens, d’un corps, d’un langage, du moins nous reste-t-il, mais ensemble, la grâce de l’effleurer.

Les mots, en quelque sorte, ne peuvent qu’effleurer ce qui se trouve ainsi hors de notre portée. Mais peut-être permettent-ils au moins d’un peu le partager.

Christophe Manon, Au nord du futur, 2016, Nous.

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« Extrêmes et lumineux » de Christophe Manon. https://www.librairie-ptyx.be/extremes-et-lumineux-de-christophe-manon/ https://www.librairie-ptyx.be/extremes-et-lumineux-de-christophe-manon/#respond Wed, 19 Aug 2015 07:35:12 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5305

Lire la suite]]> extreme_et_lumineux-168x264L’art du fragment – on l’a déjà dit maintes fois, on se répète – sert souvent plus à camoufler une carence qu’à réellement étoffer un propos. Dans l’incapacité de trouver un liant, il permet d’en camoufler l’absence sous l’appartenance à un « style », une « technique », une « tradition ».  Le fragment est excuse ou prétexte là où il devrait être question.

repre

nant inlassablement les mêmes passages, corrigeant, amendant, modifiant, ajustant, ajoutant, supprimant, essayant dans un geste obstiné et presque vengeur d’épuiser la possibilité d’expression d’un souvenir, d’une réminiscence, d’un visage, d’une image, d’une sensation, d’émotions, de joies ou de tristesses, de réanimer l’imperceptible lueur d’une présence, comme tournant autour avec maladresse et imprécision sans jamais parvenir à les circonscrire, à leur donner l’épaisseur et le contour du réel, leur sens et leur saveur échappant irrémédiablement non seulement aux possibilités matérielles de la langue, mais aussi et surtout aux capacités du scripteur, mesurant ainsi son impuissance à revivre et faire revivre ce qui a été, toutes ces années passées maintenant, tous ces êtres disparus, chacun de ces instants révolus demeurant définitivement inaccessibles, émergeant de la conscience tels de vagues motifs sans relief difficiles à reconstituer et dont on peut douter de la validité, comme des ruines au cœur d’un paysage brumeux, fantasmes, fictions inconsistantes fabriquées avec le temps par sédimentation, car : comment se rappeler, comment être sûr de la réalité des faits

Qu’est ce qu’un souvenir? Comment émerge-t’il? Que penser des retours de certains?  Comment les dire?  Toutes questions au cœur de Extrêmes et lumineux.  Composé de fragments, de séquences – souvenir d’un tabassage, description d’une photographie, évocations d’étreintes sauvages, réminiscences d’un théâtre ambulant, etc… -, chacune commençant par la seconde moitié d’un mot dont la première achevait la précédente, Extrêmes et lumineux est très loin du Coq à l’âne abrupt.  Ces fragments sans points, brefs, s’ils s’arrêtent et commencent bien comme sur les bords d’un gouffre, comme dans la brutalité d’une coupure, suspendent le temps en leur sein.  Tissés de longues phrases, toutes en participe présent, les séquences de souvenirs paraissent comme suspendues, intemporelles, entre les arêtes coupantes d’un abyme.  Saisissant le lecteur dans ce contraste, Christophe Manon a compris que questionner le passé ne pouvait aller sans se saisir de la question de sa survenance dans le présent.  Ample, sublime, ce roman nous enserre dans une boucle à l’image de nos vies.  Dont l’écrivain doit moins s’affairer, en archéologue de son passé, à chercher une sortie – y en a-t-il une?- qu’à préciser, toujours mieux, chaque fois plus précisément, les strates que lui en laisse une mémoire cahotante.  Nos vies sont sans sortie.  Elles n’offrent pas de prises pour les saisir.  Mais dans leur espace clos demeurent des possibilités de superbement ressasser…

tout cela remonté à la surface, traîné, porté, charrié, imaginé, inventé, conçu, élaboré, trafiqué, mis en branle dans une sorte de frénésie à la fois douloureuse et jubilatoire, avec seulement un peu d’encre et du papier, comme si ces maigres matériaux suffisaient à pouvoir exprimer l’insaisissable mouvement de l’existence

Christophe Manon, Extrêmes et lumineux, 2015, Verdier.

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