Vieux Brol – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 Vieux brol 24 : « Splendeurs et misères des courtisanes » de Honoré de Balzac. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-24-splendeurs-et-miseres-des-courtisanes-de-honore-de-balzac/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-24-splendeurs-et-miseres-des-courtisanes-de-honore-de-balzac/#respond Tue, 27 Nov 2018 07:55:50 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7972

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Ne subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Les femmes qui ont mené la vie alors si violemment répudiée par Esther arrivent à une indifférence absolue sur les formes extérieures de l’homme. Elles ressemblent au critique littéraire d’aujourd’hui, qui, sous quelques rapports, peut leur être comparé, et qui arrive à une profonde insouciance des formules d’art  : il a tant lu d’ouvrages, il en voit tant passer, il s’est tant accoutumé aux pages écrites, il a subi tant de dénouements, il a vu tant de drames, il tant fait d’articles sans dire ce qu’il pensait, en trahissant si souvent la cause de l’art en faveur de ses amitiés et de ses inimitiés, qu’il arrive au dégoût de toute et continue néanmoins à juger.

À eux deux, Lucien et Herrera formaient un politique.

La Justice est un être de raison représenté par une collection d’individus sans cesse renouvelés, dont les bonnes intentions et les souvenirs sont, comme eux, excessivement ambulatoires. Les parquets, les tribunaux ne peuvent rien prévenir en fait de crimes, ils sont inventés pour les accepter tout faits. 

Plus sa vie est infâme, plus l’homme y tient; elle est alors une protestation, une vengeance de tous les instants.

Pourquoi n’aime-t-on pas ceux qui nous aiment, car enfin ils font tout pour nous plaire.

Le monde, qui plie devant l’argent ou la gloire, ne veut pas plier devant le bonheur, ni devant la vertu.

La poésie a été sublime, la prose n’a d’autre ressource que le réel, mais le réel est assez terrible comme il est pour pouvoir lutter avec le lyrisme.

On voit qu’à tous les étages de la société, les usages se ressemblent, et ne différent que par les manières, les façons, les nuances. Le grand monde a son argot. Mais cet argot s’appelle le style.

Honoré de Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, 1847, La Pléiade.

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Vieux Brol 22 : « Illusions perdues » d’Honoré de Balzac. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-22-illusions-perdues-dhonore-de-balzac/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-22-illusions-perdues-dhonore-de-balzac/#respond Tue, 25 Jul 2017 06:27:19 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7024

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Ne subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

 

-Monsieur, j’ai un recueil de poésie…

-De la poésie, s’écria Pochon en colère. Et pour qui me prenez-vous?

 

Tout dans ces deux mondes [le littéraire et le politique] est corruption, chaque homme y est ou corrupteur ou corrompu.

L’écrivain à la mode est plus insolent, plus dur envers les nouveaux venus que ne l’est le plus brutal libraire. Où le libraire ne voit qu’une perte, l’auteur redoute un rival : l’un vous éconduit, l’autre vous écrase.

Il n’y a pas une vertu qui ne soit doublée d’un vice. La littérature engendre bien les libraires.

La conscience, mon cher, est un de ces bâtons que chacun prend pour battre son voisin, et dont il ne se sert jamais pour lui.

Tout journal est une boutique où l’on vend au public des paroles de la couleur dont il les veut. S’il existait un journal des bossus, il prouverait soir et matin la beauté, la bonté, la nécessité des bossus.

En effet le commerce de librairie dite de nouveautés se résume dans ce théorème commercial : une rame de papier blanc vaut quinze francs, imprimée elle vaut, selon le succès, ou cent sous ou cent écus.

Paris est en quelque sorte la Belgique de la province : on y trouve des retraites presque impénétrables, et le mandat de l’huissier poursuivant expire aux limites de sa juridiction.

Je ferais le mal comme je viens de le faire ici, avec les meilleures intentions du monde.

Honoré de Balzac, Illusions perdues, 1843, La Pléiade. 

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Vieux brol 21 : « Phèdre et Hyppolyte » de Racine. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-21-phedre-et-hyppolyte-de-racine/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-21-phedre-et-hyppolyte-de-racine/#respond Tue, 12 Jul 2016 07:39:28 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=6146

Lire la suite]]> 1639-1699 französischer Schriftsteller,Tragödienautor. CDV-Foto 6,0 x 8,5 cm, Woodburytype, nach einem Gemälde von E. Hader, herausgegeben von Sophus Williams Verlag Leipziger Str. 29 Berlin 1890.

Ne subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Phèdre atteinte d’un mal qu’elle s’obstine à taire

Lasse enfin d’elle-même, et du jour qui l’éclaire,

Peut-elle contre vous former quelques desseins? (Théramène)

 

Si je la haïssais, je ne la fuirais pas. (Hyppolyte)

 

De l’amour, j’ai toutes les fureurs. (Phèdre)

 

Et ne devrait-on pas à des signes certains

Reconnaître le cœur des perfides humains? (Thésée)

 

Ainsi que la Vertu, le Crime a ses degrés. (Hyppolyte)

 

J’aime, j’aime, il est vrai, malgré votre défense. (Hyppolyte)

 

Tu te feins criminel pour te justifier. (Thésée)

 

Hyppolyte est sensible et ne sens rien pour moi. (Phèdre)

Je respire à la fois l’inceste et l’imposture.

Mes homicides mains promptes à me venger

Dans le sang innocent brûlent de se venger

Misérable! Et je vis? Et je soutiens la vue

 

De ce sacré Soleil, dont je suis descendue? (Phèdre)

Détestables Flatteurs, Présent le plus funeste

 

Que puisse faire aux Rois la colère céleste. (Phèdre)

 

L’Hymen n’est point toujours entouré de Flambeaux. (Hyppolyte)

 

Et la mort à mes yeux dérobant la clarté

Rend au jour, qu’ils souillaient, toute sa pureté. (Phèdre)

 

Jean Racine, Phèdre & Hyppolyte, 1678, La Pléiade.

 

 

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Vieux brol 20 : « Agamemnon » de Eschyle. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-20-agamemnon-de-eschyle/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-20-agamemnon-de-eschyle/#respond Tue, 05 Apr 2016 07:35:37 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5849

Lire la suite]]> EuménidesNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Dis le chant lugubre, lugubre; mais que triomphe le sort heureux.

Un dieu fut grand jadis, débordant d’une audace prête à tous les combats : quelque jour on ne dira plus qu’il a seulement existé.

ce n’est qu’à celui qui a souffert que la Justice accorde de comprendre.

La mesure est le bien suprême.

de la prospérité germe un insatiable malheur. […] Non, c’est l’acte impie qui en enfante d’autres, pareils au père dont ils sont nés.

de l’heure dernière le prix est infini.

Ah! Tristes sont les hommes! Leur bonheur est pareil à un croquis léger; vient le malheur : trois coups d’éponge humide, c’en est fait du dessin!

Qui donc, qui donc, parmi les hommes, pourra se flatter désormais d’être né pour un sort qui l’exempte de maux?

conjecturer n’est pas savoir.

ma main en a fait un cadavre, et l’ouvrage est de bonne ouvrière.

l’exilé se repaît d’espérances.

Courage! L’heure est bonne : va, gave-toi de tes crimes.

Eschyle, Agamemnon, 458 av. JC, Les Belles Lettres.

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Vieux Brol 19 : « La critique de la raison pure » D’Emmanuel Kant. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-19-la-critique-de-la-raison-pure-demmanuel-kant/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-19-la-critique-de-la-raison-pure-demmanuel-kant/#respond Tue, 15 Dec 2015 08:40:53 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5724

Lire la suite]]> Emmanuel KantNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Des pensées sans contenu sont vides ; des intuitions sans concepts sont aveugles.

J’entends donc par « synthèse » au sens le plus général l’acte d’ajouter les unes aux autres des représentations différentes et de saisir leur diversité en une connaissance.

de toutes les représentations, la liaison est la seule qui ne peut être donnée par les objets, mais qui ne peut être effectuée que par le sujet lui-même.

L’objet est ce dont le concept « réunit » le divers d’une intuition donnée.

Mais, quant à cette propriété de notre entendement, de n’arriver à l’unité de l’aperception qu’au moyen de catégories […], on n’en peut pas plus donner de raisons que l’on n’en peut donner donner du fait que nous ayons précisément telles fonctions du jugement et pas d’autres, ou du fait que le temps et l’espace sont les formes de notre intuition possible.

« Penser » un objet et « connaitre » un objet, ce n’est donc pas une seule et même chose.

Par suite il n’y a pas de connaissance « à priori » possible pour nous que celles d’objets d’expérience possible.

Le manque de faculté de juger est proprement ce que l’on nomme sottise, et à tel vice, il n’y a pas de remède. Une tête obtuse ou bornée, à laquelle il ne manque que le degré convenable d’entendement et des concepts qui lui soient propres, peut très bien être équipée par l’étude, et arriver même jusqu’à l’érudition. Mais comme il y a encore habituellement manque dans la faculté de juger, il n’est pas rare de rencontrer des hommes fort instruits qui laissent  fréquemment voir, dans l’usage qu’ils font de leur science, cet irréparable défaut.

Le temps ne s’écoule pas, mais en lui s’écoule l’existence du changeant.

La « possibilité de l’expérience » est donc ce qui donne une réalité objective à toutes nos connaissances « à priori ».

Tous les changements arrivent suivant la loi de liaison de la cause et de l’effet.

La simple conscience, mais empiriquement déterminée, de ma propre existence prouve l’existence des objets autour de moi.

On ne peut affirmer de la sensibilité qu’elle soit la seule espèce d’intuition possible.

« L’entendement » et la « sensibilité » ne peuvent chez nous déterminer des objets « qu’en s’unissant ».

ce que les choses peuvent être en soi, je ne le sais pas et n’ai pas besoin de le savoir.

Par ce Je, par cet Il ou par ce Cela (la chose) qui pense, on ne se représente rien de plus qu’un sujet transcendantal des pensées = X, lequel n’est connu que par les pensées, qui sont ses prédicats : pris isolément, nous ne pouvons jamais en avoir le moindre concept.

Je ne connais pas un objet, quel qu’il soit, par cela seul que je pense.

Ainsi donc, une connaissance cherchée en dehors des limites de l’expérience possible, alors même qu’elle regarde l’intérêt le plus élevé de l’humanité, tant qu’on la demande à la philosophie spéculative, se résout en une espérance illusoire.

Mais, si l’empirisme devient lui-même dogmatique par rapport aux idées (comme il arrive le plus souvent), et s’il nie avec assurance ce qui est au-dessus de la sphère de ses connaissances intuitives, il tombe alors à son tour dans le vice d’immodestie qui est ici d’autant plus blâmable que l’intérêt pratique de la raison en reçoit un irréparable dommage.

En effet, est effectivement réel tout ce qui s’accorde en un contexte avec une perception suivant les lois de la progression empirique.

En effet, si les phénomènes sont des choses en soi, il n’y a plus moyen de sauver la liberté.

S’il existe quelque chose, quoi que ce soit, il faut accorder aussi que quelque chose existe « nécessairement ».

Je démontrerai que la raison […] déploie vraiment ses outils pour s’élever au-dessus du monde sensible par la seule force de la spéculation.

« Etre » n’est manifestement pas un prédicat réel […]. C’est simplement la position d’une chose ou de certaines déterminations en soi.

Avec cette preuve ontologique (cartésienne), si renommée, qui prétend démontrer par des concepts l’existence d’un être suprême, l’on ne fait que perdre toute sa peine et son travail, et nul homme ne saurait devenir plus riche en connaissances avec de simples idées, pas plus qu’un marchand ne le deviendrait en argent si, dans la pensée d’augmenter sa fortune, il ajoutait quelques zéros à son livre de caisse.

La nécessité inconditionnée dont nous avons si indispensablement besoin comme de l’ultime support de toutes choses est le véritable abîme de la raison humaine.

l’intérêt spéculatif de la raison nous oblige à regarder toute ordonnance dans le monde comme si elle était issue du dessein d’une raison suprême.

Lorsqu’on ne fait pas, de l’idée d’un être suprême, un usage simplement régulateur, mais au contraire un usage constitutif (ce qui est contraire à la nature d’une idée), le premier vice qui en résulte est la « raison paresseuse » (ignava ratio).

Ainsi toute connaissance humaine commence par des intuitions, va de là à des concepts et finit par des idées.

il n’y a pas de fin au discours si l’on ne parvient à la véritable cause de l’apparence par laquelle le plus raisonnable même peut être abusé.

Laissez donc parler votre adversaire, quand il ne fait que parler raison, et combattez simplement avec les armes de la raison.

Est pratique tout ce qui est possible par la liberté.

L’intention finale de la sage et pourvoyeuse nature dans l’ordonnance de notre raison ne tend proprement qu’à ce qui est moral.

 

  1. Que puis-je savoir?
  2. Que dois-je faire? 
  3. Que m’est-il permis d’espérer?

 

La route « critique » est la seule qui soit encore ouverte.

Emmanuel Kant, La critique de la raison pure, 1787, Gallimard, coll. La Pléiade, trad. F. Alquié, A. Delamarre, J.Ferrari, B. Lortholary, F. Marty, J. Rivelaygue, S. Zac.

 

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Vieux brol 18 : « Lettres à Lucilius, livre 1 à 6  » de Sénèque. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-18-lettres-a-lucilius-livre-1-a-6-de-seneque/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-18-lettres-a-lucilius-livre-1-a-6-de-seneque/#respond Fri, 10 Jul 2015 07:26:02 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=5330

Lire la suite]]> seneque

Ne subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

La part la plus considérable de la vie se passe à mal faire, en large part à ne rien faire, toute la vie à n’être pas à ce que l’on fait.

C’est n’être nulle part que d’être partout.

Ce n’est jamais du présent seul que viennent nos peines.

Ce sont deux extrémités à éviter, de se faire semblable aux méchants, parce qu’ils représentent le nombre ; de se faire l’ennemi du grand nombre, parce qu’il ne nous ressemble pas.

On exagère la douleur ; on l’anticipe ; on se la forge.

Le sage ne ne provoquera donc jamais la colère des puissants. Il rusera avec elle, comme avec l’ouragan le marin.

La faim est peu coûteuse ; ce qui coûte, c’est un palais blasé.

Oui, Lucilius, la servitude ne retient que peu d’hommes ; il en est plus qui retiennent la servitude.

Ton premier devoir, le voici, mon cher Lucilius : fais l’apprentissage de la joie.

Dans la pensée de bien des gens, vivre n’est pas douloureux ; c’est oiseux.

A l’occasion sache te désobliger.

Ces vérités, je le sais, ont été dites souvent, et se diront souvent encore

Pense à la mort toujours pour ne la craindre jamais.

Nul ne sait être à soi.

Le nécessaire a pour mesure l’utile.

La trace d’une main amie, imprimée sur les pages, assure ce qu’il y a de plus doux dans la présence : retrouver.

Nous serions à nous, si ces pauvres choses n’étaient pas à nous.

La pire folie est de juger un homme, soit sur l’habit, sur sur la condition, qui n’est qu’un habit jeté sur nous.

La plus indigne des servitudes est la servitude volontaire.

Vis pour autrui si tu veux vivre pour toi.

Il est doux de séjourner avec soi-même le plus longtemps possible, quand on s’est rendu digne d’être pour soi-même un objet de jouissance.

L’effet de la sagesse, c’est une joie constante.

Sénèque, Lettres à Lucilius, livres 1 à 6, vers 63, Les Belles Lettres.

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Vieux brol 17 : « La métaphysique » de Aristote. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-17-la-metaphysique-de-aristote/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-17-la-metaphysique-de-aristote/#respond Tue, 13 Jan 2015 08:18:30 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=4744

Lire la suite]]> Platon AristoteNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Tous les hommes désirent naturellement savoir.

[Nos sensations] ne nous disent le pourquoi de rien, pourquoi, par exemple, le feu est chaud : elles se bornent à constater qu’il est chaud.

ce n’est pas, en effet, au sage à recevoir des lois, c’est à lui d’en donner.

La philosophie des premiers temps, du fait qu’elle est jeune encore et à ses débuts, semble, en effet, balbutier sur toutes choses.

Chaque philosophe trouve à dire quelque chose sur la Nature ; en lui-même, cet apport n’est rien sans doute, ou peu de choses, pour la vérité, mais l’assemblage de toutes les réflexions produit de féconds résultats.

Ainsi autant une chose a d’être, autant elle a de vérité.

il vaut mieux connaître une chose par ce qu’elle est que par ce qu’elle n’est pas.

rien n’est plus absurde que de prétendre qu’il existe des réalités déterminées en dehors de celles que nous voyons dans l’Univers sensible […] Quand on dit, en effet, qu’il existe l’Homme en soi, le Cheval en soi et la Santé en soi, sans rien ajouter, on ne fait qu’imiter ceux qui disent qu’il y a des dieux, mais que les dieux ont la forme de l’homme.

Mais les subtilités de la Fable ne valent pas la peine qu’on les soumette à un examen sérieux.

D’où pourrait venir, en effet, un autre un, en dehors de l’Un en soi?

tout ce qui est en puissance n’est pas nécessairement en acte. – D’un autre côté, si les éléments existent seulement en puissance, il peut se faire que rien n’existe du tout.

même ce qui n’est pas encore a la puissance d’exister.

L’Un ne se sépare pas de l’Etre.

la philosophe doit être capable de spéculer sur toutes choses.

La Dialectique se contente d’éprouver le savoir, là où la Philosophie le produit positivement.

Il n’est pas possible, en effet, de concevoir jamais que la même chose est et n’est pas.

il est ridicule de chercher à discuter avec quelqu’un qui ne peut parler de rien : un tel homme, en tant que tel, est dès lors semblable à un végétal.

une collection de tous les attributs ne fait pas une unité.

En admettant même que ce vrai n’existe pas, du moins y a t’il déjà du plus ferme et du plus véritable.

C’est d’après la forme que nous connaissons toutes choses.

il y a quelque chose d’autre encore en dehors de la sensation.

il y a un être qui met continuellement les choses en mouvement et le premier Moteur est lui-même immobile.

la diagonale est incommensurable.

C’est pourquoi tout être n’est pas bon ou méchant, juste ou injuste, mais il y a aussi l’état intermédiaire.

Et, de même que, dans le domaine de l’action, notre devoir est de partir de chaque bien particulier, pour faire que le bien général devienne le bien de chacun, ainsi doit-on partir de ce qu’on connaît le mieux soi-même, pour rendre ce qui est connaissable en soi connaissable pour soi-même.

Cadavre et vinaigre viennent de l’animal et du vin, à la façon dont la nuit vient du jour.

un être est puissant, soit parce qu’il a lui-même la puissance d’être modifié, soit parce qu’un autre être a la puissance d’être modifié par lui.

Ainsi tous les arts, c’est-à-dire toutes les sciences poétiques, sont-ils des puissances, car ce sont des principes de changement dans un autre être, ou dans l’artiste lui-même en tant qu’autre.

c’est de l’acte que procède la puissance.

La science du philosophe est celle de l’Etre en tant qu’être, pris universellement et non dans l’une de ses parties ; mais l’être s’entend de plusieurs manières, et non pas d’une seule façon.

La sophistique vit dans le Non-Etre!

Nous désirons une chose parce qu’elle nous semble bonne, plutôt qu’elle ne nous semble bonne parce que nous la désirons : le principe c’est la pensée.

Le premier Moteur est donc un être nécessaire, et, en tant que nécessaire son être est le Bien, et c’est de cette façon qu’il est principe.

la vie et la durée éternelle appartiennent donc à Dieu, car c’est cela même qui est Dieu.

L’Intelligence suprême se pense donc elle-même, puisqu’elle est ce qu’il y a de plus excellent, et sa Pensée est pensée de pensée.

Le commandement de plusieurs n’est pas bon : qu’il n’y ait qu’un seul chef!

Les formes les plus hautes du Beau sont l’ordre, la symétrie, le défini, et c’est là surtout ce que font apparaître les sciences mathématiques.

j’appelle fiction la violence faite à la vérité, en vue de satisfaire à une hypothèse.

Il n’y a science que de l’universel.

la relation n’est une substance, ni en puissance, ni en acte.

l’observation des faits montre bien que la nature n’est pas une série d’épisodes sans lien, à la façon d’une méchante tragédie.

on tient un discours interminable, comme celui des esclaves, quand on ne trouve rien de sensé à dire.

Aristote, La métaphysique, entre 364 et 322 av. JC, 2002, Vrin, trad. J. Tricot.

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Vieux brol 16 : « Le Protreptique » de Clément D’Alexandrie. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-16-le-protreptique-de-clement-dalexandrie/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-16-le-protreptique-de-clement-dalexandrie/#respond Mon, 01 Dec 2014 07:53:06 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=4425

Lire la suite]]> ProtreptiqueNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Que la vérité débarrasse les hommes de l’erreur, leur offrant, comme une main très puissante, l’intelligence, pour les sauver : ils vont relever la tête et se redresser, abandonner l’Hélion et le Citeron pour habiter Sion.

Car de Sion sortira la loi, et de Jérusalem le Logos du Seigneur.

Le logos de Dieu ayant méprisé la Lyre et la cithare, instrument sans âme, régla par l’Esprit Saint notre monde et tout particulièrement ce microcosme, l’homme, âme et corps.

il n’y a dans les mystères, pour tout dire en un mot, que meurtres et ensevelissements.

Ainsi, il y a deux extrêmes dans l’ignorance religieuse : l’impiété et la superstition, en dehors de quoi il faut tâcher de se maintenir.

montre-lui seulement un soutien-gorge brodé : le vrai Zeus se révèle percé à jour.

En tout cas, alors qu’ils s’imaginent offrir aux dieux des sacrifices agréables, les hommes ne se rendent pas compte qu’ils égorgent des hommes.

vous finissez par n’être rien que des cadavres, pour avoir en fait mis votre foi en des cadavres.

toujours la matière a besoin de l’art, tandis que Dieu est sans besoin.

Seul compte le Logos, c’est le Logos qui seul compte.

Ne t’arrête pas, ô philosophie, à ce seul Platon.

Chacun voit maintenant avec évidence, je crois, que faire ou dire quelque chose sans le Logos de vérité, c’est comme être obligé de marcher sans pieds.

Dieu, paternellement, cherche sa créature, la guérit de sa chute.

C’est la folie seule, me semble-t-il, qui remplit une vie consacrée avec une telle ardeur au culte de la matière.

N’allez pas croire que des pierres, des morceaux de bois, des oiseaux, des serpents sont sacrés, et que les hommes ne le sont pas.

Cherchons donc, afin de vivre.

Par le Logos le monde entier est devenu désormais une Athènes et une Grèce.

Tu verras les cieux, ô vieillard, toi qui ne vis pas Thèbes!

Clément d’Alexandrie, Le Protreptique, 2004, Le Cerf, trad. Claude Mondésert et André Plassart.

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Vieux brol 15 : « Amers » de Saint-John Perse. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-15-amers-de-saint-john-perse/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-15-amers-de-saint-john-perse/#respond Tue, 07 Oct 2014 08:03:26 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=4394

Lire la suite]]> Saint John perseNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

inallusive et pure de tout chiffre, la tendre page lumineuse contre la nuit sans tain des choses?

Ils m’ont appelé l’Obscur et j’habitais l’éclat.

Ah! nous avions mieux auguré de l’homme sur la pierre.

Et nous savons maintenant ce qui nous arrêtait de vivre, au milieu de nos strophes.

Nos hanches qu’enseigne toute houle, à ce mouvement lointain de foule déjà s’émeuvent et s’apparentent.

Textuelle, la Mer s’ouvre nouvelle sur ses grands livres de pierre.

Et cette mer encore est-elle mer, qui creuse en nous ses grands bas-fonds de sable et qui nous parle d’autres sables?

(Et, là! que voulions-nous dire que nous n’avons su dire?)

O mon amour au goût de mer, que d’autres paissent loin de mer au fond de vallons clos.

O mer levée contre la mort!  Qu’il est d’amour en marche par le monde à la rencontre de ta horde ! Une seule vague sur son cric!…

Et la mer étrangère, ensemencée d’écume, engendre au loin sur d’autres rives ses chevaux de parodie…

Mais la fierté de vivre est dans l’accès, ni dans l’usage ni l’avoir.

Je t’aime – tu es là – et tout l’immense bonheur d’être là qui fut consommé.

J’aurai pour celle qui m’entends les mots qui d’homme ne sont mots.

Votre île n’est pas mienne où l’arbre ne s’effeuille.

Heureux les égarés sur la mer.

Veuillent nos phrases dans le chant, par le mouvement des lèvres graciées, signifier plus, ô dieux! qu’il n’est permis au songe de mimer.

Saint-John Perse, Amers, 1958, Gallimard.

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Vieux brol 12 : « Le livre de l’intranquillité » de Fernando Pessoa. https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-12-le-livre-de-lintranquillite-de-fernando-pessoa/ https://www.librairie-ptyx.be/vieux-brol-12-le-livre-de-lintranquillite-de-fernando-pessoa/#respond Fri, 06 Jun 2014 15:30:51 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=3936

Lire la suite]]> fernando_pessoaNe subsiste bien souvent de certains livres, dans nos esprits assommés par la « nouveauté  » , qu’une vague idée, que le souvenir lointain (et bien souvent déformé) de commentaires.  N’en surnage que l’impression d’un déjà connu, d’un déjà lu, qui les fait irrémédiablement verser dans les limbes de ce qui n’est définitivement plus à lire.  D’où l’idée de cette série de chroniques de retours aux textes lus.  Sans commentaires.

Il me faut choisir entre deux attitudes détestées – ou bien le rêve, que mon intelligence exècre, ou bien l’action, que ma sensibilité a en horreur ; ou l’action pour laquelle je ne suis pas né, ou le rêve pour lequel personne n’est né.  Il en résulte, comme je déteste l’un et l’autre, que je n’en choisis aucun, mais comme, dans certaines circonstances, il me faut bien ou rêver, ou agir, je mélange une chose avec l’autre.

Passer des fantômes de la foi aux spectres de la raison, c’est simplement changer de cellule.

Ils ont tous comme moi, une âme exaltée et triste.  Comme je les connais bien!  Employés de magasin, garçons de bureau ou petits commerçants ; d’autres encore sont ces Tartarins de café, généreux sans le savoir, dans l’extase de leur discours égotiste, satisfaits dans leur silence d’égoïstes et d’avares sans trésor à garder.  Mais tous sont poètes – les pauvres! – et traînent à mes yeux, comme je le fais aux leurs, le fardeau misérable de notre commune incongruence.  Ils ont tous, comme moi, leur avenir derrière eux.

Mes pauvres compagnons, qui rêvez tout haut, comme je vous envie et vous méprise!

Bienheureux ceux qui ne confient leur vie à personne.

Nous dormons la vie.

Et il existe peut-être d’autres dimensions, où nous vivons également d’autres aspects tout aussi réels de nous-mêmes.

Aussi n’aurai-je pas parlé ; j’aurai dit.

Qu’ils obéissent donc à la grammaire, ceux qui ne savent penser ce qu’ils sentent.

sentir aujourd’hui la même chose qu’hier – c’est se souvenir aujourd’hui de ce qu’on a ressenti hier, c’est être aujourd’hui le vivant cadavre de ce qui fut hier la vie, désormais perdue.

Le mieux, le plus digne de la pourpre, c’est d’abdiquer.

Dire!  Savoir dire!  Savoir exister par la voie écrite et l’image mentale!  La vie ne vaut pas davantage.  Le reste ce sont des hommes et des femmes, des amours supposées et des vérités factices, subterfuges de la digestion et de l’oubli, êtres s’agitant en tout sens – comme ces bestioles sous une pierre qu’on soulève – sous le vaste rocher abstrait du ciel bleu et dépourvu de sens.

Etre compris, c’est se prostituer.

Et puis, tous les révolutionnaires sont stupides.

Il est des départs de soleil couchant plus douloureux pour moi que la mort d’un enfant.

Raconter, c’est créer, car vivre ce n’est qu’être vécu.

Je serai toujours un homme de la rue des Douradores – comme l’est l’humanité tout entière.

Je suis une étagères de flacons vides.

Je gis la vie.  Rien de moi n’interrompt absolument rien.

Le fait divin d’exister ne doit pas être livré au fait satanique de coexister.

Mais les autres, qu’ont-ils donc en commun avec le monde que je porte en moi?

Je voudrais que la lecture de ce livre vous laisse l’impression d’avoir traversé un cauchemar voluptueux.

L’immortalité est une fonction du grammairien.

Ma patrie c’est la langue portugaise.

Le seul vice vraiment noir, c’est de faire comme tout le monde.

Voir c’est avoir vu.

Côtoyer ses joies et ses angoisses comme on côtoie une personne sans intérêt.

Avoir la pudeur de soi-même.

On dirait que ma vie entière, et jusqu’à ma vie mentale, n’est qu’un long jour de pluie, où tout est non-événement et pénombre, privilège vide et raison d’être oubliée.  Je me désole en haillons de soie.  Je m’ignore moi-même, en lumière et ennui.

Je n’écris pas en portugais.  Je m’écris moi.

Où sont donc les vivants?

Fernando Pessoa, Le livre de l’intranquillité, 1999, Christian Bourgois, trad. François Laye.

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