être submergé de tendresse pour sa clientèle – ptyx https://www.librairie-ptyx.be "Hommes, regardez-vous dans le papier" H.MICHAUX Thu, 25 Apr 2019 08:01:20 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.1.1 L’aboutissement du capitalisme III : la couper à Amazon https://www.librairie-ptyx.be/laboutissement-du-capitalisme-iii-la-couper-a-amazon/ https://www.librairie-ptyx.be/laboutissement-du-capitalisme-iii-la-couper-a-amazon/#respond Tue, 29 Jan 2019 14:49:06 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=8099

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Peu le savent en dehors du paysage éditorial mais, quand on est éditeur, éviter le grand méchant Amazon* n’est pas aussi évident qu’on croit. En effet, si vous ne disposez pas d’un diffuseur/distributeur qui s’occupe pour vous de placer vos livres dans les librairies, en vous refusant à Amazon vous vous coupez d’un potentiel de vente devenu d’autant plus important que vous aurez moins facilement accès au circuit traditionnel des librairies. Et quand vous disposez des services d’un diffuseur/distributeur, les clauses du contrat qui vous lient à lui vous empêchent de facto de refuser à ce que vos livres soient vendus via Amazon. Car refuser de vendre ou de faire vendre vos livres à un libraire et un seul (hé oui, Amazon est bien juridiquement un libraire) est assimilé à un refus de vente. Et le refus de vente c’est interdit. Coincé entre le marteau commercial de l’auto-distribution et l’enclume juridique des dispositions légales de la distribution par un tiers, l’éditeur parait alors bien souvent aussi démuni financièrement qu’éthiquement.

Et pourtant…

Et pourtant, parfois, il est possible de retourner contre lui les exigences de celui qui vous domine de la tête et des épaules.

Il se trouve en effet qu’Amazon exige, entre autres choses, (l’avantage de la position dominante est de ne plus devoir reconnaître dans le client sa fonction de client, de partenaire celle de partenaire, de fournisseur de fournisseur, etc. le dominant peut juste se contenter d’exiger…) que chacun des livres qui lui parvient soit clairement identifiable par un code-barre dûment fonctionnel et directement visible. Pas de code-barre ou code-barre illisible ou code-barre à l’intérieur du livre, et votre livre ne sera pas vendu via Amazon**! Point! Libre alors au distributeur, en cas de commande reçue d’Amazon, d’étiqueter le livre lui-même avant de l’envoyer au « libraire » en ligne. Souvent, cette mesure est appliqué par défaut par le distributeur, sans remise d’ordre au cas par cas par l’éditeur, les coûts incombant cependant à ce dernier. Bref, pour qu’un des livres de son catalogue ne soit pas vendu via Amazon, il suffit à l’éditeur de rater lamentablement son code-barre, de le mettre à l’intérieur du livre ou de, tout simplement, l’omettre, et de donner ordre à son distributeur de ne pas l’étiqueter lui-même. Cqfd***. Ayant appris la chose il y a peu, nous avons décidé (nous c’est-à-dire Vies Parallèles. Attention : pub), à partir de la parution de La Mort par les plantes ****(attention : teasing) de foirer systématiquement le code-barre de chacun de nos livres, de le dissimuler à l’intérieur ou de ne pas en mettre et de faire savoir à notre bien-aimé distributeur (Belles Lettres Diffusion Distribution) de ne pas répondre favorablement à la demande d’étiquetage éventuellement reçue du « libraire en ligne ». Bref, en un mot comme en cent, les livres de Vies Parallèles parus après novembre 2018 ne seront plus disponibles sur Amazon. Voilà!***** & *******

* On ne va pas rappeler ici pourquoi Amazon c’est mal. À moins d’être aveugle, sourd, décérébré et mort depuis 1980, chacun est au courant d’au moins treize raisons qui peuvent venir appuyer ce constat sans appel.

** Ce qui ne veut pas dire qu’il ne se retrouvera pas sur son site, bien entendu. L’objectif étant d’agréger à soi le maximum, tout, absolument tout, doit être mis sur la vitrine Amazon. À défaut alors du livre que vous cherchiez, c’est votre acte de recherche qui sera monétisé.

*** Cela ne résout bien entendu pas tout. Certains « libraires », s’adonnant aux joies du marketplacing sur Amazon pourront, eux, continuer à recevoir nos livres et à les placer sur le grand foutoir informatique. Mais cela complique quand même singulièrement les choses…

**** Franchement, il nous en aurait coûté de publier un livre se proposant de façon très pratique de renverser les mécanismes de pouvoir à l’oeuvre et de « devoir » vendre celui-ci sur le site honni d’un groupe qui travaille à sa perpétuation.

****** Libraire chéri, ceci équivaut à une déclaration d’amour en bonne et due forme.

******* N’étant nullement un « éditeur de gauche », il ne nous viendrait nullement à l’idée que nous puissions par notre démarche faire germer dans l’esprit des « éditeurs de gauche » l’idée de faire pareil. Car le catalogue de « l’éditeur de gauche », pour la seule raison suffisante qu’il est « éditeur de gauche », n’est bien entendu pas, ou plus, sur le site de l’ogre néo-libéral-fasciste. Hein?

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La tête et les cornes https://www.librairie-ptyx.be/la-tete-et-les-cornes/ https://www.librairie-ptyx.be/la-tete-et-les-cornes/#respond Tue, 08 Jan 2019 07:33:12 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=8049

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Le champ poétique a ceci en commun avec celui du christianisme débutant qu’il parait constitué à nombre égal de pratiquants et de chapelles. Comme si un domaine, à mesure qu’il cherchait à se créer une légitimité (ou, dans sa variante pessimiste, à mesure qu’il se réduit), devait forcément se diviser en autant d’entités indépendantes que de pratiquants, tous prétendant fermement incarner la vérité ou l’acmé de ce domaine et accusant l’autre d’hérésie. Dans le champ de la poésie française, on sera P.O.L. ou Gallimard Blanche, Flammarion ou Castor Astral, Eric Pesty ou Corlevour, etc. et rarement l’un et l’autre, la relation entre tous étant au mieux teintée de mépris, au pire d’indifférence. Celle-ci, pratiquée avec assiduité, se transformant alors en ignorance. À cette situation très clivante de la poésie contemporaine française en tant que telle s’ajoute le peu d’intérêt qu’elle parait manifester, à son corps défendant, pour les formes les plus contemporaines de la poésie en langue étrangère. Si l’on en retire la masse importante de traductions de l’américain (souvent les mêmes d’ailleurs, et souvent morts…), le champ de la poésie traduite occupe une place marginale dans celui de la création contemporaine. Et cela est d’autant plus marquant pour le lecteur neutre (c’est-à-dire celui n’écrivant pas de poésie et qui ne peut donc être suspecté de parti-pris) que des lecteurs du chinois, du japonais, du russe, de l’anglais, de l’allemand, du kirghize, etc. ont parfois depuis bien longtemps pu découvrir dans leur propre langue des œuvres essentielles de la poésie norvégienne, hollandaise, russe, berbère ou française. Pratiquant de la langue de Vondel, nous connaissons ainsi nombre d’exemples de poètes néerlandophones qui sont traduits depuis des lustres en bien d’autres langues, chez des éditeurs unanimement considérés comme de premier plan, et dont le travail est estimé comme majeur, et qui n’éveillent pas même le moindre début du tiers du quart d’un semblant d’intérêt chez quelque éditeur francophone que ce soit. Il y a décidément, dans ce domaine très précis de la poésie, un gouffre entre la réalité et le satisfecit d’ouverture et de curiosité que s’octroie à elle-même l’édition française.

La tête et les cornes est une revue qui se donne comme tâche essentielle de donner à lire de la poésie contemporaine traduite. Sans déclaration liminaire castratrice ni apparat critique (la langue d’origine, le nom de l’auteur, celui du traducteur, point), la revue est, au sens strict du terme, une revue de poésie*. Ni laboratoire de formes (où la revue serait vue comme un espace où l’on tente, non, ici les essais sont réussis), ni revue critique (où seraient disséquées des œuvres parues), ni revue-sandwich-salon-du-refusé (où les collaborateurs profiteraient de l’espace qu’ils créent pour se l’approprier**), La tête et les cornes permet à son lecteur de découvrir des formes aussi nouvelles qu’abouties, aussi radicalement étrangères que riches. Qu’elle soit norvégienne, coréenne, suédoise, américaine, allemande, française, etc. la poésie qu’elle nous propose est, à chaque fois, une façon de réactiver notre curiosité. Au regard de cette vivacité formelle, les clivages et luttes de chapelles de la poésie française contemporaine paraissent bien rigolotes…

Pour tout qui s’intéresse à ce que le langage permet – ou empêche – plutôt qu’aux discours creux qu’on tient sur ce langage, La tête et les cornes est une joie nécessaire.

La tête et les cornes en est à son sixième numéro. Le numéro 6 (35 pages – six euros, une paille!) est disponible sur commande ou dans les excellentes librairies. La revue est pilotée par Marie de Quatrebarbes, Maël Guesdon, Yohanna My Nguyen et Benoît Berthelier.

*la chose n’est pas si courante qu’il n’y paraît.

** la chose est aussi courante qu’il y paraît.

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Prix ptyx 2018. https://www.librairie-ptyx.be/prix-ptyx-2018/ https://www.librairie-ptyx.be/prix-ptyx-2018/#respond Tue, 18 Dec 2018 07:58:25 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7988

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Comment encore attribuer un prix qui se veut anti-prix alors que Guyotat en a eu deux! Comment encore attribuer au prix ptyx la moindre once de sérieux alors qu’il se bornait à dénoncer l’hérésie du prix!  Si des jurés écrivant comme Neymar tient debout peuvent reconnaître du génie à un génie*, c’est bien que le prix remplit bien son office! Puisqu’on a enfin compris que l’œuvre [de Guyotat] contribue de façon importante à illustrer la qualité et la beauté de la langue française, c’est qu’on se trompait et que le prix, s’il dit des choses aussi jolies, ne peut qu’avoir raison! Le prix c’est bien! Le prix ptyx est donc mort!

Nous avions pourtant déjà élaboré une première liste (758 livres), puis une deuxième (758 – Qu’appelle-t-on panser? de Bèbère), et une troisième encore (3), qu’il ne ne nous restait plus alors, conformément à nos statuts, qu’à réduire à un texte, récipiendaire du prix ptyx 2018. Mais c’est raté! Le prix a eu raison du prix. Nous en resterons donc pour cette année à l’avant-dernière étape qui devait consacrer Marie de Quatrebarbes pour Gommage de tête et 58 lettres à Ulrike von Kleist**, Dolorès Prato pour Bas la place y’a personne, ou Adelheid Duvanel pour Anna & moi et Délai de grâce***.

* Et non, contrairement à ce que susurrent perfidement les mauvaises langues, le juré médiocre ne cherche ainsi nullement à vêtir son œuvrette des quelques parcelles de l’importance que son geste confère à une Oeuvre qu’il savait – parce qu’on le lui avait dit – déjà importante sans lui. Comme si gratifier pouvait gratifier avant tout celui qui gratifie ou l’adoubeur s’adouber… Mauvaises langues, va!

**Il se fait que nous avions écrit un truc sur notre blog concernant Gommage de tête de Marie de Quatrebarbes mais qu’une mauvaise manipulation nous le fit effacer (vu le titre, c’était joué d’avance…). Comme c’était très intelligent et que l’intelligence c’est beaucoup d’effort et qu’on avait un tantinet la flemme, on vous renvoie chez la responsable.

***Le local, rien de tel!

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Hit connection 2018! https://www.librairie-ptyx.be/hit-connection-2018/ https://www.librairie-ptyx.be/hit-connection-2018/#respond Tue, 11 Dec 2018 08:07:18 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7997

Lire la suite]]> Non seulement on cause de livres biens mais on en vend aussi. Et comme on vend plutôt bien d’abord les livres biens, on a tendance à penser que c’est peut-être bien parce qu’on en cause plutôt bien. On ne prétendra nullement qu’on est quelqu’un de bien, bien sûr – même si tout un chacun aura toujours plutôt tendance à s’accorder ce crédit-là. On affirmera par contre haut et fort que ce n’est pas parce que d’autres livres se vendent mieux ailleurs qu’ils sont meilleurs que nos livres biens à nous. Bref, tout va bien…

  1. Délai de grâce de Adelheid Duvanel (on frise les 250…)
  2. Anna & moi de Adelheid Duvanel
  3. Plantes vagabondes d’Emilie Vast
  4. I’m every woman de Liv Stromquist
  5. Essai sur le fou de champignons de Peter Handke
  6. Passer quoi qu’il en coûte de George Didi-Huberman & Niki Giannari
  7. Le Lasso & autres écrits de Jaime de Angulo
  8. Comprendre la photographie de John Berger
  9. 4321 de Paul Auster
  10. Seiobo est descendue sur terre Laszlo Krazsnahorkai
  11. Les Rigoles de Brecht Evens
  12. Bas la place y’a personne de Dolores Prato
  13. L’Enfant perdue de Elena Ferrante
  14. La joie d’apprendre de Élisée Reclus & Pierre Kropotkine
  15. La vie de Didier Fassin
  16. La petite ville de Éric Chauvier
  17. Drach de Szczepan Twardoch ex aequo avec (smiley qui se bidonne grave!) Sorcières de Mona Chollet
  18. Le fleuve sans rives de Juan José Saer
  19. Le Grand Cercle de Conrad Aiken
  20. Stratégie pour deux jambons de Raymond Cousse

 

*L’illustration de cette chronique est au choix oxymorique ou hors-sujet

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J’aime bien Gaudé mais j’aime pas Gaudé. https://www.librairie-ptyx.be/jaime-bien-gaude-mais-jaime-pas-gaude/ https://www.librairie-ptyx.be/jaime-bien-gaude-mais-jaime-pas-gaude/#respond Wed, 25 Jul 2018 08:58:02 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7736

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On aime plutôt bien Laurent Gaudé. On est assez convaincu que Laurent Gaudé est un type bien. Il n’a pas l’air de se la péter. On le sait attaché à défendre des causes que nous trouvons nous-mêmes importantes. On sait qu’il a travaillé avec des gens dont on sait qu’ils sont des types biens aussi. Donc, oui, on aime bien Laurent Gaudé. Et d’ailleurs, chaque fois qu’on nous demande, d’un air abasourdi : « Vous n’aimez pas Laurent Gaudé? », on rappelle directement  que si, décidément, on aime bien Laurent Gaudé, et que le fait qu’on ait pas ses livres n’a rien à voir avec le fait qu’on n’aimerait pas Laurent Gaudé, mais qu’on n’aime pas les livres de Laurent Gaudé. En fait même, on aimerait bien aimer les livres de Laurent Gaudé. Oui, mais voilà, si on aime bien Laurent Gaudé, c’est parce qu’il est – apparemment du moins – un type bien. Ses livres, eux… Diantre, ses livres sont tout sauf biens. Et comme c’est le bon qui rend aimable…

Vraiment on aimerait beaucoup aimer les livres de Laurent Gaudé. Finalement on fait bien l’inverse. Ainsi, on n’aime pas trop Céline mais on aime vraiment ses livres. Pound idem. Ou Rebatet. Par exemple. Donc, comme on préfère vraiment aimer les livres écrits par des types biens – ou supposés tels – que ceux écrits par des types pas biens, hé bien, à chaque fois que parait un nouveau livre de Laurent Gaudé, on s’y plonge dans l’espoir d’y trouver de quoi bâtir ne fût-ce qu’un peu de respect pour la chose. Las, ça part systématiquement en sucette. Ainsi de son dernier, à paraître en octobre de cette année*, Salina.

Imaginez ainsi que vous désiriez indiquer à un lecteur la solennité d’une situation. Là où peut-être vous mettriez discrètement l’accent sur la longue durée pendant laquelle l’action censément solennelle se déroule – quoi de plus solennel qu’une lente procession -, Laurent Gaudé, lui, n’hésite pas à bâtir le solennel sur une surenchère de lenteur. Si c’est solennel, il faut que cela se sache. Et comme solennel = lent, donc très lent = très solennel. Donc il faut beaucoup de lenteur. Et si, distrait comme il est, le lecteur loupe une occasion de remarquer la lenteur à laquelle se déroule la scène, il lui en reste des autres. Pour être précis : 13 autres! Oui da, sur les deux  pages qui détaillent la scène inaugurale du pensum, l’auteur a réussi la gageure de larder la chose de 14 rappels de sa lenteur (dont trois fois l’adverbe « lentement », une fois « le silence dure », une fois « personne ne bouge », etc…)! Ce n’est plus du John Woo, c’est un documentaire entomologiste sur mode ralenti regardé sous doliprane. Et du coup, le solennel se mue en ridicule!

C’est cela le souci avec la littérature gaudienne : la plume (ou le clavier) de son auteur (contrairement à son personnage inaugural qui, lui, ne cesse de s’arrêter) ne s’arrête jamais assez tôt. La nuit n’est pas la nuit toute bête, elle est la nuit « inquiète ». L’aube, elle, est « hésitante » . La vie est « entière » (les instants, quant à eux, sont des « vies entières »).  Le ciel a des « intentions ». Le vent a des « colères ».  Le guerrier a les « muscles bandés » ou le « corps sanglé ». Un acte censé paraître fort ou marquant le sera rarement assez au goût de son auteur s’il n’est pas décliné en plusieurs variantes : « les bêtes vont planter leurs crocs dans sa chair, la fourrager, l’ouvrir avec appétit », « sa nudité le gêne : les seins flasques comme des poches vidées, les poils du pubis clairsemés, les chairs des cuisses un peu molles et les cheveux lâchés », « tout est lent, l’agrippe, le ralentit ». Et puisque mettre des adjectifs et des adverbes partout ne suffit pas, il convient, pour renforcer encore un peu plus la « poésie du texte » d’en appeler à cette bonne vieille métaphore – ou à des figures de style qu’on n’est pas certain de pouvoir nommer – : « le désert de poussière fait plier les oiseaux » ; « un rapace saluerait le monde comme un souverain son peuple »**… Bref, à l’image du pâtissier convaincu que c’est la quantité de sucre qui est gage de la qualité de son merveilleux, la plume (ou le clavier) gaudienne confond avec superbe et aplomb littérature et surenchère. Dans l’espoir de « faire littéraire », elle fait verser sa phrase dans le ridicule. Désirant à tout prix « être original », elle égrène les clichés. Non, décidément, les livres de Laurent Gaudé, on n’aime pas…

Mais Laurent Gaudé, on l’aime bien.

*Qu’on a déjà pu tester parce que les éditions Actes Sud, opiniâtres, continuent, malgré notre refus, à nous envoyer à peu près toute leur pléthorique production.

**Tous les exemples ci-dessus ont été tiré des 30 premières très courtes pages de la chose qu’on ne saurait trop vous conseiller d’éviter.

***L’image ci-dessus (non contractuelle) est bien celle de l’écrivain qui va un pas trop loin dans la recherche de ce que l’on peut nommer « l’effet ».

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Cadeau. https://www.librairie-ptyx.be/cadeau/ https://www.librairie-ptyx.be/cadeau/#comments Fri, 29 Jun 2018 07:10:34 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7698

Lire la suite]]> Depuis 6 ans maintenant, nous vous tenons informés via ce blog des essais, des romans ou des recueils de poésie qui se dégagent naturellement de la production éditoriale actuelle. Sans consensualisme (on l’espère) ni élitisme (on l’espère aussi, même si on sait très bien que là, on ne fera pas l’unanimité…), notre objectif n’y est autre que de vous avertir de ce qui s’édite de mieux de nos jours. Parfois aussi, rarement, nous profitâmes de la notoriété inattendue de cet outil pour donner libre cours  à l’une ou l’autre de nos indignations. Ce qui ne fut pas sans résultat. Aujourd’hui, ce blog fut visité plus d’un million de fois. Ce qui fait un sacré paquet… On ne sait s’il faut nous en réjouir (ça veut peut-être dire qu’on est pas inutile) ou s’en inquiéter (si c’est utile de nous lire, ça veut aussi peut-être dire que c’est parce que ce qu’on écrit n’est plus lisible ailleurs). Le temps est venu de prendre un peu de repos (sur le blog hein, la librairie, elle, reste bien entendu ouverte comme d’habitude). Ce sera l’occasion pour nous de se concentrer sur d’autres tâches : conseiller des clients en restant attentif au tour de France et à la coupe du monde de Football, remplir des dossiers de demandes d’aides à l’édition et/ou à la traduction, traduire de la poésie néerlandaise, tenter de comprendre comment un gars qui dit qu’il est « de gauche » en arrive à commander ses livres sur Amazon et/ou à circuler en Uber, traduire de la prose américaine, replonger dans le mécanisme passionnant d’attribution des aides à l’édition de la Fédération Wallonie Bruxelles, lire des services de presse de la rentrée littéraire, ricaner en lisant des services de presse de la rentrée littéraire, s’extasier en lisant des services de presse de la rentrée littéraire, faire des livres, lire et relire tout Aristote, maintenir la forme pour le Tuscany Trail et la Frend Divide de l’année prochaine, contempler les engins de chantier qui vont bloquer la rue pendant six mois… Bref, le blog (et le blog seul hein, la librairie, on le répète, reste bien ouverte comme d’habitude) ferme pour un mois.

Mais comme on est gentil et qu’on désirait vraiment vous remercier d’une fidélité à laquelle on ne s’attendait pas (et qu’on n’est pas sûr de mériter), on vous donne à lire ici un inédit absolument splendide d’Adelheid Duvanel dont le prochain recueil, Anna & moi, sort ce 21 août 2018, chez Vies Parallèles bien sûr, traduit par Catherine Fagnot bien sûr! Qui, comme toute l’oeuvre de l’immense suissesse, est à lire un minimum de deux fois…

 

Sansmoi

            Le jeune homme essaie de prendre pied dans la nouvelle ville. Au café, il dit souvent : « Sans moi » quand ses collègues conviennent de quelque chose. On l’appelle bientôt Sansmoi ; on oublie son véritable nom. Après chaque phrase qu’il prononce, Sansmoi est pris de crainte et d’effroi : il est persuadé qu’il ne pourra plus dire une phrase de sa vie. Parler le fatigue : il doit reconstituer son âme image par image. Mais ses images sont vagues, confuses. L’arbre dénudé danse dans le vent froid. Sansmoi est debout devant la baie vitrée, le coude levé, le verre de bière à la main. Dans la rue, la lampe qui se balance à un fil soudain s’allume : il est cinq heures et quart. Une demi-heure plus tard, il fait nuit et le tramway fait entendre sa cloche. « C’est oppressant, tout ce que tout le monde attend de moi », dit Sonja au fond de la pièce en tirant violemment sur sa manche. Sansmoi veut qu’elle soit maternelle avec lui : par mère, il entend une femme aux pieds enflés qui porte de petites pantoufles. Il essaie de faire savoir à Sonja qu’il est presque aveugle et presque sourd, mais elle n’en croit rien. Bien qu’il ait loué un grand appartement, Sonja n’est pas autorisée à vivre chez lui. Elle s’occupe de son ménage et couche à l’occasion avec lui, mais il ne permet pas qu’elle passe la nuit là. Sonja demanda un jour dans quoi il travaillait : « Piscine », répondit-il. Elle s’imagina qu’il était maître-nageur, un de ces hommes qui font les cent pas le long du bassin en surveillant les nageurs, pour sauter illico dans l’eau et sauver quelqu’un qui serait en train de se noyer. Mais Sansmoi ne fait pas partie des sauveteurs : il construit des piscines. Quand elle s’aperçut de son erreur, Sonja fut déçue. On entend un craquement dans le mur. Sansmoi est toujours immobile à la fenêtre. Sonja, qui n’a pas le droit d’allumer la lumière, vacille soudain et heurte violemment du bras la porte de l’armoire, qui s’ouvre. En fait, Sonja voudrait dire : « Je suis enceinte », mais elle remet sans cesse cela à plus tard. Elle craint que son ami ne lui dise : « Sans moi. »

 

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Happy 2018! https://www.librairie-ptyx.be/happy-2018/ https://www.librairie-ptyx.be/happy-2018/#respond Sat, 16 Dec 2017 12:51:00 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7335

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C’est peu dire que 2017 fut un grand cru! La qualité du débat public, la quantité d’amour déversée, le niveau d’empathie, la reconnaissance de l’intelligence comme valeur cardinale, le degré général de subtilité : le monde, c’est un fait, est devenu plus beau, plus vivable en 2017. Et, sachez-le, cette tendance devrait se confirmer l’année prochaine! Oui, 2017, c’était vraiment bien! Mais 2018 sera carrément top moumoutte!  En exclusivité nous avons désiré vous dévoiler quelques-uns des événements qui viendront faire de votre année 2018 une totale réussite :

Le secteur culturel continuera à contribuer à la mise en oeuvre courageuse d’un monde décroissant ; un homme exagérément bronzé, un seul, se noiera en méditerranée des suites d’une collision entre un jet-ski fuchsia et un yacht plaqué or ; Apple obtiendra le label Max Havelaar ; le clavier A,Z,E,R,T,Y deviendra le clavier A,Z,E,E.,R,T,Y ; comme le coût de la vie augmentera beaucoup, beaucoup de gens décideront d’économiser sur cet aspect-là ; l’hétérosexuel blanc avouera enfin que « tout ça c’est sa faute »; Bruno Latour sortira son premier livre de cuisine ; Bernard Stiegler avouera que « tout ça c’était une bonne grosse blague »; « islamo-gauchisme », « complot juif » et « intelligence artificielle » seront officiellement considérés comme des pléonasmes ; Put me a three, le snuffmovie mettant en scène Pierre Rabhi gangbangé par 3 colibris et sept licornes sortira enfin en français ; madame Legrand, Carolomacérienne nonagénaire et fière membre du FN depuis 72 ans apprendra (grâce à sa petit-fille informaticienne, Adolfine) que Jean-Marie, le Strasbourgeois blond sémillant rencontré via Meetic et dont elle était tombée éperdument amoureuse, s’appelle en fait Abdelkader, et qu’il ne vient pas, mais alors là pas du tout, de Strasbourg, c’est bête tout de même, mais c’est comme ça…

Mais aussi, et surtout, en 2018, il y aura Parce que l’Oiseau de Fabienne Raphoz, Revers de Dominique Quelen, L’Enfant perdue de Elena Ferrante, Les Œuvres Complètes de Ossip Mandelstam, Chronique des sentiments, tome 2 de Alexander Kluge, Splendide Hotel de Gilbert Sorrentino, et surtout surtout (attention, ce qui suit est à vocation publicitaire) :

 

 

Europa Minor de Miklos Szentkuthy. Quatrième tome de l’immense Oeuvre de l’Ogre hongrois, il est aussi, de l’avis de tous ceux qui l’ont lu, celui par lequel sa découverte est la moins abrupte. Il vous y plongera dans l’univers d’un évêque Robin des Bois et dans celui d’un empereur moghol, instigateur de la première tentative de syncrétisme monothéiste. Et vous rappellera que l’avenir de l’Europe est – depuis toujours – en Orient…

 

 

 

 

 

 

Délai de Grâce de Adeleheid Duvanel. Auteure de Suisse alémanique tombée dans l’oubli puis redécouverte depuis peu dans sa langue d’origine, elle était encore inédite en langue française. Nous sommes particulièrement heureux de vous la donner à découvrir. Elle conjugue la radicale inventivité de l’enfance ou de la déviance avec la rigueur formelle la plus pointilleuse. Elle ne ressemble à rien de connu. Elle est bouleversante. Elle est essentielle.

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Meilleures ventes 2017. https://www.librairie-ptyx.be/meilleures-ventes-2017/ https://www.librairie-ptyx.be/meilleures-ventes-2017/#respond Mon, 11 Dec 2017 07:04:40 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7305

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Chaque année l’accrochage de la guirlande et le fourrage de dindes riment avec top 20. Ainsi le libraire, en bon commerçant néo-libéral qu’il est, pense bilan, ventes et listes. Chez nous – qui proposons – grâce à vous – qui disposez -, ça donne ce qui suit :

 

  1. Jim Shepard, Le Maitre des miniatures, 2017, Vies Parallèles, trad. Hélène Papot. (on approche résolument des 300…)
  2. Joël Baqué, La mer c’est rien du tout, 2016, P.O.L.
  3. Tim Ingold, Faire, 2017, Dehors, trad. trad. Hervé Gosselin & Hicham-Stéphane Afeissa.
  4. Sergueï Essenine, La Ravine, 2017, Héros-Limite, trad. Jacques Imbert.
  5. Ron Silliman, You, 2016, Vies Parallèles, trad. Martin Richet.
  6. Mateo Alaluf, Daniel Zamora, Seth Ackerman, Jean-Marie Harribey, Contre l’allocation universelle, 2016, Lux
  7. Paul Valéry, L’homme et la coquille, 2017, Editions Marguerite Waknine.
  8. Joël Baqué, La Fonte des glaces, 2017, P.O.L.
  9. Didier Fassin, Le Monde à l’épreuve de l’asile, 2017, Société d’ethnologie.
  10. Eric Chauvier, La Petite ville, 2017, Amsterdam.
  11. David Antin, Parler aux frontières, 2017, Vies Parallèles, trad. Jean-François Caro & Camille Pageard.
  12. Elena Ferrante, Celle qui fuit et celle qui reste, 2017, Gallimard, trad. Elsa Damien.
  13. Pierre Senges & Sergio Aquindo, Cendres des hommes et des bulletins, 2017, Le Tripode.
  14. Tadeusz Konwicki, Chronique des événements amoureux, 2017, Wildproject, trad. Hélène Wlodarczyk.
  15. Gertrude Stein, Le Livre de lecture, 2016, Cambourakis, trad. Martin Richet.
  16. Edouardo Kohn, Comment pensent les forêts, 2017, Zones Sensibles, trad. Grégory Delaplace.
  17. Fabienne Raphoz, Blanche Baleine, 2017, Héros-Limite.
  18. Conrad Aiken, Le Grand Cercle, 2017, La Barque, trad. Joëlle Naïm.
  19. heimrad backer, transcription, 2017, Héros-Limite, trad. Eva Antonnikov.
  20. Regina Ullmann, La Route de campagne, 2017, Circé, trad. Sibylle Muller.

 

C’est pas qu’on fait que vous conseiller des trucs biscornus. On en vend aussi!

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Doucheflux! https://www.librairie-ptyx.be/doucheflux/ https://www.librairie-ptyx.be/doucheflux/#comments Mon, 27 Nov 2017 07:14:27 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7299

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Depuis les révélations des panama papers, il est devenu de bon ton d’être transparent quant à la destination des fonds d’entreprise. C’est forts de cette évolution sociétale – et aussi un peu anxieux de nous voir emportés par cette tourmente – que nous avons décidé de révéler au grand jour à quelles fins seront consacrées les sommes énormes que nous amasserons durant le mois de décembre. Et cela pour couper court à toutes les spéculations qu’aura pu engendré notre trop long silence. Voici donc le décompte précis :

99 % : rochefort 10, disques de musique contemporaine, salaire d’un auteur qui vend pas assez pour pouvoir survivre de sa plume (plume fraîchement cueillie chaque aube de l’aile droite d’une oie cynoïde), gouffre à pognon, sparadrap pour les lunettes, shampoing anti-pelliculaire, pâtes, pain de mie, riz, pommes de terre, anti-dépresseurs, chaussettes blanches…

1% : Doucheflux

Bref, venez (et si vous ne pouvez venir chez nous, sachez que vous pouvez aider Doucheflux autrement!)

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Comment devenir Auteur-culte? https://www.librairie-ptyx.be/comment-devenir-auteur-culte/ https://www.librairie-ptyx.be/comment-devenir-auteur-culte/#respond Wed, 30 Aug 2017 11:37:27 +0000 http://www.librairie-ptyx.be/?p=7084

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Toi aussi, peut-être, rêves-tu de devenir Auteur-culte. Pas simplement auteur, non. Ni même lu. Ni particulièrement célèbre. Ni riche. Juste, et en toute modestie, Auteur-culte. Fort d’une longue et riche expérience en lecture d’Oeuvres-cultes, dont celle dont la couverture figure ci-dessus peut être considérée comme son acmé, nous avons décidé de vous détailler la recette qui vous permettra d’accéder au strapontin rêvé.

  1. Trouvez-vous un sujet sexy mais peu couru, qui puisse aguicher et intriguer. Attention, il ne s’agit pas simplement de racoler. L’Auteur-culte ne le devient, quand bien même sa démarche serait de prétendument s’en défendre, qu’en s’habillant des oripeaux du savant. L’ornithothanatophilie, c’est sexy mais juste trop peu couru. La philosophie analytique, c’est juste trop couru et pas sexy (et puis, c’est compliqué aussi – le but n’est pas de se fouler non plus, juste de devenir Auteur-culte, rappelons-le). Tout est dans le dosage. La gnose, par exemple, c’est très bien. Ça fait mystérieux et savant à la fois. C’est un domaine pas encore trop encombré. Ça permet de dire pas mal d’énormités sans devoir les justifier auprès d’un trop grand nombre de contradicteurs.
  2. Nous sommes dans le règne de l’image. L’Auteur-culte se doit de trancher. Tel le sujet de son Oeuvre-culte qui n’a d’autre utilité que de le faire repérer, son physique se doit d’être à l’avenant. Rasé de près chez les barbus, pileux à donf parmi les têtes d’œuf, vous vous devrez de veiller avec soin à votre apparence, tout en faisant attention à ne pas paraître le faire.
  3. Assénez les Grosses-Bêtises*. Non seulement la Grosse-Bêtise fascine (oulala keskilose lui, kétoupet) mais sa répétition convaincue convainc (ben oui). Scandée, la Grosse-Bêtise finit par endormir le lecteur, dont elle emporte l’adhésion sans qu’il ne doive y aller de son consentement explicite, ni l’Auteur-culte du moindre effort. On rappelle ici (oui encore) que l’objectif est bien de devenir Auteur-culte, non de faire des efforts. Là où l’auteur non culte (ce plouc), faisant son dégoûté devant la Grosse-Bêtise, se devra de se justifier, se légitimer sans fin, la Grosse-Bêtise, abondamment et adroitement assénée, permet à l’Auteur-culte d’en faire le moins possible. Le Moindre-Effort et la Grosse-Bêtise sont constitutifs de l’Auteur-culte.
  4. L’Auteur-culte doit faire des liens. Plein de liens. Et si possible – mais l’existence même de l’Auteur-culte nous démontre que tout, absolument tout, est possible -, improbables. Ainsi vous sera-t-il avantageux de lier, par exemple, l’Évangile de Thomas et Buffy The Vampire Slayer.  Certes, c’est gros. Très gros même. Mais c’est très efficace. Car la référence à un bon gros blockbuster de la série-télé américaine est à la fois sexy, tempérant et diantrement utilitaire. Tempérant car ça rassure le chaland (faut pas non plus causer que de trucs peu courus – cfr le point 1). Diantrement utilitaire car ça attire d’autre chalands (le savant que vous êtes devenu aux yeux du lecteur se doit de se montrer accessible et populaire à son égard, et cela ne se peut mieux qu’en en légitimant les paresses que lui-même juge les plus coupables**).
  5. L’Auteur-culte se doit d’être appelé Auteur-culte sur le quatrième de couverture de son Oeuvre-culte.
  6. Étouffez dans l’œuf la critique. Devenir Auteur-culte nécessitant de prendre certaines libertés avec la rigueur et la réalité, votre Oeuvre-culte ne manquera pas de prêter le flanc à la critique. Nombre d’auteurs-pas-culte (ces ploucs) s’attelleront à décortiquer celle-ci, se faisant un malin plaisir d’y relever toutes les Grosses-Bêtises que vous y aurez glissées. C’est ballot… Mais à chaque problème sa solution! Convainquez à l’avance, et donc au sein de l’Oeuvre-culte elle-même, votre contempteur d’être malhonnête*** si vous prétendez à l’honnêteté, d’être de droite si vous vous destinez à figurer à gauche, d’être un tenant de l’académisme quand vous voulez renvoyer l’image d’un Auteur-culte en marge. Martelez que toute critique à l’Oeuvre-culte ne peut être due qu’à une focale biaisée du grincheux qui, tout à sa haine de l’Auteur-culte, ne s’aperçoit pas que les paradigmes mêmes sur lesquels ce plouc fonde ses jérémiades sont ceux-là mêmes que précisément bouleverse l’Oeuvre-culte en question. Vous craignez d’être attaqué sur le pan de la rigueur****? Ecrivez que la rigueur n’est qu’une fabrication d’un monde positiviste que vous vous proposez d’abattre! Vous vous inquiétez d’être accusé de prendre des libertés avec la réalité? Précisez que votre Oeuvre-culte n’a d’autre but que de faire fi du réel, ce vieux truc tout pourri!

Auteur-culte padawan, tu sais ce qu’il te reste à faire.

Pacôme Thiellement, La victoire des sans roi, 2017, PUF.

* » [L’évangile de Jean] est un livre qui parle d’amitié entre les hommes et non de relation d’un maître à ses disciples » Pacôme Thiellement in « La Victoire des sans roi« .  « Si vous demeurez vraiment dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples » Évangile selon Jean, VIII, v.31. Et aussi : l’Auteur-culte oublie la dimension eschatologique d’une très grande partie des premiers textes relatifs à Jésus (qu’ils aient été « consacrés » ou non), l’Auteur-culte oublie l’aspect proprement rhétorique des apologies et autres textes des pères de l’Eglise, l’Auteur-culte oublie que l’histoire des débuts du christianisme n’était nullement faite d’une ecclesia dominant directement les autres et dès le départ désireuse de dicter sa docta (joli ça) à des hérésies, l’Auteur-culte oublie avec un tel aplomb et une telle constance tout ce qu’il lui est utile d’oublier qu’on peut en tirer la conclusion suivante : l’Oubli-Systématique est une autre face de la Grosse-Bêtise.

** Regarder Buffy The Vampier Slayer, c’est assez proche de la lobotomisation. Ça passe mieux si un Auteur-culte nous dit que c’est méga-top, car on peut y « penser le contemporain ». Ouf…

*** « Qui aurait la malhonnêteté de prétendre que tout ce qui, dans l’Histoire, s’est affublé du nom de « christianisme » ait pu avoir un autre sens que permettre souterrainement, par le miroir outrancier de sa contrefaçon, à la parole de Jésus d’être conservée pour, à tout moment, pouvoir être entendue par les personnes qui en auraient besoin? » Pacôme Thiellement in « La Victoire des sans roi« . Et hop, le tour est joué. Il n’importe pas de dire ici quoi que ce soit de compréhensible, juste de prétendre que celui qui lui opposera quelque critique que ce soit est forcément malhonnête.

**** « Jésus a raté son coup », Pacôme Thiellement in « La Victoire des sans roi », page 7. « Jésus a réussi son coup », Pacôme Thiellement in « La Victoire des sans roi », page 57.

 

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