« Poèmes retrouvés » de Georges Oppen

Ses pieds s’enfonçaient insensiblement dans le sable. N’emplissant rien.

En 2015, un jeune chercheur américain, David B. Hobbs, découvrait 21 poèmes de Georges Oppen que celui-ci avait envoyé en 1930 à Louis Zukofsky et qui, depuis lors, avaient sommeillé à l’insu de tous. La découverte était d’autant plus intéressante que nous ne possédions pour ainsi dire rien qui précède la parution de son premier recueil Série discrète. À la joie de pouvoir encore lire un peu plus de la poésie d’Oppen s’y ajoutait alors celle de peut-être pouvoir mieux encore aborder l’une des œuvres poétiques majeures du siècle passé.

Exister ; être au milieu des choses.

Plutôt que de seulement donner à lire en français ces poèmes écrits avant 1930, les éditeurs et le traducteur ont décidé de faire suivre ceux-ci de poèmes non recueillis en volume, d’un choix de poèmes inédits, ainsi que des 26 fragments de texte retrouvés dans la chambre où Oppen fut hospitalisé à la fin de sa vie. L’ensemble, accompagné des Poésies complètes (qui ne l’étaient donc pas tout à fait) publiées en 2011 constitue donc l’oeuvre poétique complète de l’auteur objectiviste.

Nous sommes dignes de vivre

Uniquement parce que certaines choses ont été dites

Pas répétées

Dites

Alors certes, c’est la loi du genre, la chose est inégale. Si certains poèmes ou fragments peuvent être considérés comme faisant partie du meilleur de l’auteur, d’autres, si l’on fait fi de leur intérêt pour comprendre la genèse de l’oeuvre, peuvent paraître plus anecdotiques. Il n’empêche, du Oppen reste du Oppen. Et – la grandeur d’un poète se mesurant aussi à l’aune de ce qui paraît plus « accessoire », moins construit, dans son oeuvre – non seulement, la moindre parcelle d’Oppen vaut quelques tonnes de papiers imprimés sous d’autres noms, mais aussi ce contact peut-être plus direct que permet justement la mise à plat de tous ces fragments nous rend-t-il le poète encore plus proche, plus intime. Et ces derniers poèmes, ces derniers fragments punaisés sur les murs de sa chambre, arrachés à la maladie, résonnent avec une profondeur d’autant plus émouvante.

le poème est

une conviction aussi violente

que la lumière

Georges Oppen, Poèmes retrouvés, 2019, Corti, trad. Yves di Manno.

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